[Critique] Dernière Nuit à Milan : Un polar urbain divertissant mais inégal

Caractéristiques

  • Titre : Dernière Nuit à Milan
  • Titre original : L’Ultima Notte Di Amore
  • Réalisateur(s) : Andrea Di Stefano
  • Scénariste(s) : Andrea Di Stefano
  • Avec : Pierfrancesco Favino, Linda Caridi, Antonio Gerardi et Francesco Di Leva.
  • Distributeur : Universal Pictures International France
  • Genre : Thriller
  • Pays : Italie
  • Durée : 125 minutes
  • Date de sortie : 7 juin 2023
  • Acheter ou réserver des places : Cliquez ici
  • Note du critique : 7/10

Un thriller humain et urbain

Dernière nuit à Milan ou Ultima notte d’Amore dans son titre original est le nouveau film d’Andrea Di Stefano, connu pour avoir réalisé Paradise Lost (avec Benicio Del Toro) et The Informer (avec Clive Owen). Pour son premier film en Italie, il s’entoure d’un casting quatre étoiles, avec Pierfrancesco Favino (Le Traître, Une famille italienne), Francesco Di Leva – son partenaire de jeu dans Nostalgia de Mario Martone – et Linda Caridi. Dans ce polar nerveux prenant place à Milan, Franco Amore, policier modèle et mari dévoué, admiré de tous pour son sérieux et son dévouement, est à la veille de son départ en retraite. Alors qu’il écrit son discours pour la cérémonie du lendemain, il est appelé sur les lieux d’un crime qui fera basculer sa dernière nuit de travail dans le chaos le plus total : une véritable descente aux enfers dans les rues de la capitale lombarde.

La force première du film de Di Stefano est de créer des personnages attachants et forts. On éprouve immédiatement de l’empathie pour ce flic intègre et charismatique, joué avec justesse par un Pierfrancesco Favino encore une fois très investi, mais également pour son entourage, dont on ressent la force des liens familiaux et amicaux. La loyauté que chacun éprouve pour l’autre est cependant mise à rude épreuve lorsque certains protagonistes se mettent à flirter avec l’illégalité…

En plus d’être divertissant et par instants émouvant, Dernière nuit à Milan est avant tout un film très urbain. Le générique propose un long plan filmé au drone sur la métropole, accompagné d’une musique très prenante et rythmée, faite de percussions et de souffles. On comprend alors immédiatement que Milan sera un personnage à part entière du long-métrage. Di Stefano capte le mouvement des voitures, les lumières et l’effervescence de la ville grâce à de nombreux plans aériens, n’hésitant pas à tourner de nuit pour rendre ces instants encore plus impressionnants.

Une construction habile au rythme effréné…

Copyright Loris T. Zambelli

Dès sa scène d’introduction, Dernière nuit à Milan est mené tambour battant. Le rythme est enlevé et le film recèle de nombreux moments de tension et d’action particulièrement divertissants, agrémentés de la partition musicale de Santi Pulvirenti, très présente et dynamique. Andrea Di Stefano utilise par instants la shakycam pour donner au spectateur l’impression de vivre l’instant de manière encore plus immersive, et il insuffle au long-métrage une énergie et une vivacité bienvenues. A cela s’ajoutent le montage fluide et les transitions habiles de Giogiò Franchini et la photographie très soignée de Guido Michelotti.

L’action étant resserrée sur à peine quelques heures, le spectateur est tenu en haleine du début à la fin du film. Seul un flashback nous replonge dans les jours précédant cette nuit intense et permet de comprendre les enjeux de l’intrigue pour en accroître le suspense. Ce jeu sur la temporalité se retrouve à deux autres reprises dans le long-métrage, le réalisateur choisissant de mettre en valeur deux scènes particulièrement oppressantes. En les faisant jouer en temps réel, il étire l’action et rend la tension entre les personnages encore plus palpable.

Andrea Di Stefano ne manque certainement pas d’ambition en mettant en scène ce polar nerveux : il choisit, en effet, de tourner en 35 millimètres et de filmer une scène sur une véritable autoroute, sans effets spéciaux. Voir Pierfrancesco Favino courir sur cette voie rapide, dépassé par des voitures roulant à vive allure devant une caméra filmant à 360°, vaut particulièrement le détour.

… mais un film par instants trop poussif

image Pierfrancesco Favino dernière nuit à milan
Copyright Loris T. Zambelli

Avant de tourner Dernière nuit à Milan, le réalisateur a fait un travail d’investigation approfondi dans le milieu des forces de l’ordre. Il voulait réaliser un polar réaliste dans une Italie contemporaine et a donc pris le temps de se documenter. Il a ainsi discuté avec des agents de la Direction des Enquêtes Antimafia et s’en est inspiré pour dépeindre le milieu criminel milanais. En rencontrant également quelques familles de policiers et de carabiniers, il a ressenti l’amertume de certains agents, déçus que l’Etat ne reconnaisse pas leur investissement à leur juste valeur. Son film est donc une manière de rendre hommage à ces policiers et de redorer leur image, parfois malmenée par le cinéma.

Cependant, cette note d’intention du cinéaste entraîne une certaine exagération dans le traitement des personnages et de leurs qualités. En érigeant Franco Amore en héros vertueux et exemplaire, le réalisateur s’éloigne de son ambition naturaliste et insuffle à l’histoire une dimension mystique un peu trop naïve et moralisatrice. Le film finit par ressembler à une parabole religieuse ou à une mise en garde peu subtile contre le mirage d’une vie meilleure dans l’illégalité.

Par ailleurs, le long-métrage suit un scénario des plus classiques : le personnage principal succombe assez vite à l’appel de l’argent facile et c’est son grand amour Viviana qui met alors tout en œuvre pour le sortir de ce mauvais pas. Malgré le jeu plein de fraîcheur de Linda Caridi et son alchimie certaine avec Pierfrancesco Favino, le développement de leur couple manque malheureusement d’originalité et de finesse.

Présenté en avant-première à l’ouverture de la dernière édition de Reims Polar, Dernière nuit à Milan est donc un film divertissant mais inégal : s’il présente un scenario très conventionnel et se perd par instants dans un discours trop moralisant, Andrea Di Stefano parvient, grâce à une mise en scène précise et ambitieuse et à un casting charismatique, à proposer un polar urbain particulièrement nerveux et efficace.

Article écrit par

Lorsqu’elle n’enseigne pas l’italien, Lucie Lesourd aime discuter de sa passion pour le cinéma, le théâtre et les comédies musicales. Spécialisée en littérature young adult et grande amatrice de polars et thrillers, elle rejoint Culturellement Vôtre en février 2020 pour y partager ses avis lecture et sorties culturelles.

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