[Critique] Elyas : Une série B sympathique

Caractéristiques

  • Titre : Elyas
  • Réalisateur(s) : Florent Emilio-Siri
  • Scénariste(s) : Florent Emilio-Siri
  • Avec : Florent-Emilio Siri, Laëtitia Eldo, Jeanne Michel, Dimitri Storoge, Olivia Bonamy...
  • Distributeur : StudioCanal
  • Genre : Action, Thriller
  • Pays : France
  • Durée : 1h39
  • Date de sortie : 3 juillet 2024
  • Note du critique : 6/10

Quand Emilio singe Tony

Elyas est le nouveau film du réalisateur Florent Emilio Siri avec en vedette l’acteur Roschdy Zem. Un thriller français qui n’est pas sans rappeler le scénario de Man of Fire de Tony Scott et sans doute réalisé pour surfer sur la vague des The Equalizer et autres John Wick.


Comme dans le métrage d’action de 2004, qui mettait en vedette Denzel Washington protégeant une jeune fille issue d’une famille bourgeoise de Mexico pour la préserver d’un éventuel enlèvement, Elyas va s’attacher à la petite Nour, issue cette fois d’une riche famille des Emirats Arabes Unis.

Florent Emilio Siri n’en est d’ailleurs pas à son coup d’essai niveau références, avec des films comme Otage ou Nid de Guêpes (le premier évoque une réadaptation de La maison aux otages et le second un remake à peine dissimulé du film Assaut de John Carpenter), mais le réalisateur connaît son affaire et le film Elyas finit par ressembler à une très honnête série B qui sait maintenir la pression entre deux fusillades et deux cassages de tête.

roschdy zem dans elyas de florent emilio-siri

Un scénario simple mais efficace

Comme nous l’ avons cité précédemment, Elyas s’inspire grandement de Man of Fire mais, bien que le personnage de Denzel Washington soit lui-même au bord du suicide, l’originalité dans Elyas est que le personnage souffre également d’un stress post-traumatique qui maintient pendant une partie du métrage l’incertitude sur les événements qui se déroulent sous nos yeux.

Elyas est-il vraiment si doué qu’il repère tous les complots qui se trament autour de lui ou en invente-t-il une grande partie ? Les mercenaires chargés de s’occuper de ses clients sont-ils réels ou bien les a-t-il imaginés ?
Un second niveau de lecture pas inintéressant mais qui, pour le bien de l’action (et c’est bien le cœur du film) ne sera pas maintenu jusqu’au bout. Un choix comme un autre, qui rend malheureusement par effet rebond, une partie du métrage un peu artificielle.

Mais clairement il y a surtout une envie de donner un spectacle nerveux et un peu régressif (dans le bon sens du terme) qui en plus n’hésite pas à proposer quelques surprises. Néanmoins, quelques ficelles scénaristiques un peu grosses (un trait assez commun dans ce genre de film) nuisent à notre bonne implication dans les événements qui se déroulent.

Ce sont certes des détails (on dit pourtant souvent que le diable s’y cache), mais on est en droit de se demander par exemple pourquoi la famille qui tente de se cacher d’un ennemi aux moyens financiers colossaux n’a rien trouvé de mieux que de s’installer discrètement dans un palais des Mille et une Nuits au beau milieu de la France, le tout protégé par pas plus de quatre ou cinq gardes du corps. A d’autres moments du métrage, on se demande également aléatoirement comment les mercenaires ont pu perdre leurs traces ou inversement comment ils ont bien pu les retrouver, ou encore pourquoi, dans le dernier tiers du film, le héros peut passer par un toit sans aucune protection alors que ses ennemis savent pertinemment qu’il arrive.

Bref, tout cela fleure bon les raccourcis scénaristiques faciles, mais le métrage parvient à trouver son équilibre – au moins en termes de rythme – et à nous offrir un spectacle nerveux et sans temps mort. Le tout appuyé par une réalisation manquant d’inspiration mais efficace – même si le combat dans la caravane s’avère particulièrement bien réalisé. Elyas s’en sort honorablement sur ce point, même si un dernier défaut vient noircir l’ensemble.

jeanne michel et roschdy zem dans elyas de florent emilio-siri

De bonnes compositions parfois mal écrites

Dans le registre du casting du film, il y a bien sûr l’acteur Roschdy Zem, parfaitement à l’aise dans son rôle de vieux baroudeur (un peu comme un certain Denzel Washington) dont les circonstances vont ranimer la flamme du guerrier qui sommeille en lui. Une apparente force tranquille, cachant en réalité un être blessé prêt à se transformer en machine à tuer à tout moment. Clairement, la performance de l’acteur constitue l’un des points forts du film, et on regrette d’autant plus que ceux qui l’entourent ne suivent pas parfaitement.

Non pas que les compositions des actrices Laëtitia Eïdo et de la jeune Jeanne Michel soient mauvaises, loin de là, mais la caractérisation de leurs personnages pose question.

Elles sont décrites à l’arrivée d’Elyas par le chef de la sécurité comme respectivement une emmerdeuse (le mot n’est pas cité explicitement pour décrire la mère, mais elle aurait viré un tas de gens pour des motifs futiles) et une « peste » pour la fille (citation directe dans ce cas), et le problème… c’est que c’est vrai. Au-delà de son professionnalisme, il est difficile de comprendre pourquoi le personnage principal s’attache à cette mère et cette fille manifestement en manque de savoir-vivre.

Alors certes, à un moment du métrage, on nous révèle les circonstances tragiques de leur fuite, mais l’empathie ne fonctionne pas autant qu’elle le devrait et, pire que tout, leurs caractères ne s’adoucissent qu’une fois mises en danger, autrement dit quand elles ont besoin d’aide et ne peuvent plus se permettre d’humilier ou d’ignorer leur entourage. Une écriture par conséquent maladroite, qui ne nous laisse plus que les méchants pour nous raisonner en se disant qu’il faut tout de même les empêcher d’arriver à leurs fins.

Des antagonistes dont la présence à l’écran est réduite à peau de chagrin, ce qui finit par devenir un défaut récurrent dans l’oeuvre de Florent Emilio Siri, sans doute trop influencé par le film Assaut de John Carpenter, à force de ne presque jamais donner de présence ou d’identité à des ennemis fantomatiques. Si dans Nid de guêpes cela faisait sens, ici, on se demande si c’est pour préparer une suite ou s’ il s’en moque. En tout cas, cela fonctionne nettement moins bien niveau émotionnel.

Pour conclure nous dirions que Elyas s’aère être un divertissement agréable pour tous les amateurs de films d’action, d’autant plus appréciable que c’est un genre plutôt rare dans nos contrées. Néanmoins, l’ensemble est plombé par un certain nombre de défauts qui l’empêche de devenir une référence. Peut être qu’un nouvel opus, si la saga se développe, palliera les défauts de son aîné.

Article écrit par

Depuis toujours, je perçois le cinéma, certes comme un art et un divertissement, mais aussi et surtout comme une porte vers l'imaginaire et la création. On pourrait dire en ce sens que je partage la vision qu'en avait Georges Méliès. Avec le temps, de nombreux genres ont émergé, souvent représentatifs de leurs époques respectives et les bons films comme les mauvais deviennent ainsi les témoins de nos rêves, nos craintes ou nos désirs. J'ai fait des études de lettres et occupé divers emplois qui jamais ne m'ont éloigné de ma passion. Actuellement, sous le pseudonyme de Mark Wayne (en hommage à l'acteur John Wayne et au personnage de fiction Bruce Wayne alias Batman), je rédige des critiques pour le site "Culturellement Vôtre". Très exigeant dans ma notation des films, en particulier concernant le scénario car c'est la base sur lequel aucun bon film ne peut émerger s'il est bancal ou pour le moins en contradiction avec son sujet. Je conserve une certaine nostalgie d'une époque qui me semble (pour l'instant) révolue où le cinéma ne se faisait pas à base de remakes, intrigues photocopiées et bien-pensance. Néanmoins, rien n'entame mon amour du cinéma, et chaque film que je regarde me le rappelle, car bons ou mauvais, ils restent le reflet de notre époque.

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