Au lendemain du grand rush de la Fashion Week parisienne, nous sommes partis découvrir la nouvelle collection automne-hiver de Cacharel dans le showroom de la marque, rue de Verneuil, non loin de Saint-Germain-des-Prés. Le même studio que celui derrière les dernières collections (notamment celle de l’automne-hiver 2016/2017), constitué de 4 jeunes créateurs, s’est attelé à la tâche afin de proposer une panoplie de pièces colorées et ajustées, toutes plus élégantes les unes que les autres et, surtout, faciles à intégrer à sa garde-robe. Avec un objectif en ligne de mire : attirer une clientèle plus jeune en boutique, d’où le nom donné à ce cru : collection 20 ans. On trouvera ainsi des vêtements aux couleurs franches (rouge, bleu roi, jaune safran), aux lignes épurées et taillés dans des tissus naturels de très belle qualité, à des prix de 30% inférieurs à ceux pratiqués l’an dernier, qui étaient déjà en-dessous de l’entrée de gamme du prêt-à-porter de luxe — surtout si l’on considère la part importante de fabrication française des vêtements Cacharel — pour un rapport qualité-prix supérieur.
On passe ainsi de 900 euros en moyenne pour un manteau à 450€, et les prix commencent à 140€ pour une les chemises et pantalons. Un rabais significatif, qui rend la collection davantage accessible aux jeunes femmes, tout en restant dans le domaine du luxe. Le caftan bleu roi, aux lignes admirablement épurées, est très agréable au toucher et s’adaptera facilement à la garde-robe de chacune. Son volume permettra par ailleurs de mettre sa silhouette en valeur en un clin d’oeil en l’associant à un jean slim ou skinny associé à des talons. Gageons qu’il en fera craquer plus d’une !
Mais ce n’est pas tout puisque l’on trouvera également un bel éventail de vestes et gilets, dont plusieurs petites doudounes matelassées ajustées aux motifs fleuris, dont les boutons de zip en forme de C (allant de pair avec le nouveau logo de la marque) font écho à ceux présents dans le streetwear notamment, et sont ici transposés de manière discrète sur des pièces élégantes, féminines et plutôt sobres. L’anti bling-bling par excellence ! Des pièces qui renouent donc (aux côtés d’autres) avec l’histoire de Cacharel, dont le nom est encore associé pour beaucoup à ses jolis imprimés des années 70. Le gilet bleu-roi, épais et d’une douceur incroyable, tiendra lieu quant à lui de vêtement-doudou préféré au coeur de l’hiver à la différence près que, contrairement à ce vieux pull confortable mais informe que vous n’osez pas porter hors de chez-vous, celui-ci pourra s’arborer fièrement.
Et puis il y a aussi ce sublime pantalon noir à taille haute, d’une fluidité remarquable, parfait pour allonger la silhouette, que l’on portera sans hésitation avec ce petit chemisier écru à l’imprimé tellement craquant qu’on le retrouve sur les doublures intérieures de plusieurs vestes, un sweat à capuche simple mais, là encore, parfaitement coupé dans un beau tissu… C’est bien simple, avec cette collection d’une belle pureté, Cacharel revient aux basiques. Non pas que les belles pièces plus originales ne soient pas à notre goût (loin de là), mais celles-là sont généralement plus difficiles à porter et ont tendance, de fait, à sortir moins souvent de notre garde-robe. Tandis que posséder de très bons basiques, c’est l’assurance de pouvoir mixer-matcher ses tenues à l’infini et surtout rapidement, sans passer des heures devant la glace le matin. Un beau manteau coloré ou un joli chemisier permet de rehausser ou mettre en valeur une tenue en apparence ordinaire sans prise de tête, et ça, c’est une véritable gageure pour une clientèle jeune, qui n’a pas les moyens d’investir dans une pièce de luxe qui dormira au fond d’un placard ou se révèlera d’une qualité moindre par rapport à son prix.
Comprendre les attentes d’une clientèle jeune
Le fondateur de Cacharel, Jean Bousquet (que nous avions interviewé l’an dernier), désormais âgé de 85 ans, a bien su saisir ce désir de qualité de la jeunesse et, en lui parlant dans les locaux de la maison, au milieu de ces vêtements qu’il n’hésite pas à prendre en main pour pointer telle finition présente sur la doublure intérieure d’une veste, on se rend rapidement compte que l’on est face à quelqu’un qui est toujours en mesure de sentir l’air du temps. Après le retour de Cacharel dans des boutiques en nom propre à Paris et en province en 2016, destinées à encourager la clientèle à revenir au centre-ville plutôt que s’aventurer dans les centres commerciaux de luxe en banlieue, son objectif est à présent de faire connaître la marque à une clientèle jeune, qui connaît généralement les parfums et le Liberty, mais ignore souvent que Cacharel créé toujours du prêt-à-porter.
Cette même clientèle exigeante, déçue par l’offre actuelle en la matière, pourtant surabondante, mais en décalage complet avec ses attentes, aussi bien dans la forme qu’en termes de rapport qualité-prix. Le dirigeant ne manque pas de souligner, d’ailleurs, qu’un gros groupe américain très connu est actuellement en grande difficulté, à l’inverse du japonais Uniqlo, en plein essor, qui, lui “a tout compris”. Les deux marques ont beau être tout à fait différentes (Uniqlo appartenant davantage au mass-market, avec un style vestimentaire différent), Uniqlo, comme Cacharel, a su comprendre à son niveau ce besoin de basiques, appuyé par une certaine qualité. Raison pour laquelle l’immense concept-store situé en plein coeur du Marais ne désemplit pas, ni les nombreuses boutiques de la marque à travers le monde.
Se renouveler tout en faisant perdurer l’esprit Cacharel
Afin d’attirer l’attention de cette cible 18-30 ans, Cacharel lancera donc dès cet été son site de commerce en ligne, permettant de shopper directement les pièces de la collection. En gardant toujours l’objectif, malgré tout, d’encourager les clientes à faire le déplacement en boutique. Il sera ainsi proposé, pour les personnes résidant à Paris, Lille, Marseille ou Nîmes, de passer récupérer son achat en boutique. L’occasion aussi de pouvoir admirer les vêtements directement, et se rendre compte sur pièce de la qualité des tissus, coupes et finitions. Le site devrait quant à lui proposer tout un univers visuel en cohérence avec l’esprit Cacharel, avec des photos de haute qualité permettant de se faire une bonne idée des pièces. Jean Bousquet aspire également à proposer de nouvelles images fortes pour sa maison, après la collaboration légendaire avec la photographe Sarah Moon, dont les clichés sont indissociables de ce que l’on a longtemps nommé “la femme-Cacharel”.
Enfin, Cacharel a lancé cette semaine en boutique une première collection capsule revisitant le Liberty si cher à son histoire et son identité. Réclamé par les clientes depuis des années, et toujours très populaire chez les plus jeunes, il fait ainsi son retour à travers quelques pièces estivales tirées des archives de la maison. On trouvera ainsi de jolies chemisiers à manches courtes, mais aussi des teddys d’une belle finesse, dont l’un (notre préféré) limité à 25 exemplaires et vendu au prix de 220€.
Cette renaissance de la marque, qui est toujours très bien considérée par rapport au rôle qu’elle tint dans l’histoire du prêt-à-porter français — le musée du Fashion Institute of Technology de New-York (FIT) l’a d’ailleurs intégrée à son exposition sur ce thème, qui se tient jusqu’ai 15 avril — n’est donc pas prête de s’arrêter, et Jean Bousquet, en expert du prêt-à-porter et savoir-faire français, mais aussi en homme d’affaires avisé, a encore de grandes idées pour lui permettre de se développer. A presque 60 ans, il semblerait donc que Cacharel connaisse aujourd’hui un second printemps.
Retrouvez la liste des boutiques et points de vente sur le site officiel de Cacharel.