[Critique] Cry Macho : Chant du coq ou chant du cygne ?

Caractéristiques

  • Titre : Cry Macho
  • Réalisateur(s) : Clint Eastwood
  • Avec : Clint Eastwood, Dwight Yoakam, Eduardo Minett, Fernanda Urrejola...
  • Distributeur : Warner Bros France
  • Genre : Comédie dramatique
  • Pays : Etats-Unis
  • Durée : 1h44
  • Date de sortie : 10 novembre 2021
  • Note du critique : 6/10

Un énième film crépusculaire dans la lignée de Gran Torino ?

Scénarisé par Nick Schenk (déjà auteur de Gran Torino et La Mule), Cry Macho est souvent à deux doigts de sonner comme une énième redite des films crépusculaires qui sont légion dans la filmographie de Clint Eastwood depuis les années 2000 – ce qui en fait un film assez mineur. Malgré cet air de déjà vu, il y a cependant une différence de taille cette fois-ci : une fin optimiste, où l’acteur-réalisateur assume glorieusement son âge sans entonner l’air de la marche funèbre ni ressasser d’éternels regrets.

Des regrets, son personnage, Mike Milo, en a (à l’image des précédentes incarnations de l’artiste) de toute évidence beaucoup et, comme dans La Mule, il accepte une mission qui semble dès le départ périlleuse : aller au Mexique pour arracher de force un jeune pré-adolescent à sa mère, sous l’influence d’un puissant cartel de drogue pour le ramener à son père, un ami de Mike qui lui a permis de remonter en scelle voilà bien longtemps, quand il était au plus bas.

clint eastwood et eduardo minett avec un coq dans le film cry macho

Une intrigue un peu trop prévisible pour un film malgré tout attachant

L’inspecteur Harry est bien loin ici et, malgré ses faux airs de “dur” – autant qu’un homme de 90 ans puisse jouer les durs, du moins – Mike Milo n’est pas là pour régler leur compte aux trafiquants de drogue. Comme on peut s’y attendre, il va nouer avec le jeune garçon mexicain une relation faite de défiance avant de laisser la place à une véritable complicité et à un profond respect. C’est à la fois convenu – parfois beaucoup trop, avec quelques passages tire-larmes qui font momentanément sortir de l’intrigue au début du road trip du duo – et malgré tout attachant et touchant.

En dépit d’un dialogue au parallèle peu subtil entre Clint Eastwood et un coq perdant et sans forces que la foi du gamin adepte des combats de coqs a requinqué et transformé en champion, la confrontation des deux fonctionne très bien. L’évolution de leur relation est certes (trop) attendue, mais Cry Macho coche les cases de ce que l’on attend d’un film mineur du cinéaste.

clint eastwood et natalia traven dans le film cry macho

Clint Eastwood enfin en paix ?

On notera également qu’ici, Clint Eastwood ne cherche absolument pas à paraître même un tout petit peu moins vieux : son Mike Milo a une vraie démarche de pépé avec des problèmes de hanches et il ne tente pas de se donner une aura romantique comme dans Gran Torino, où son personnage meurt de manière aussi tragique qu’héroïque. Même s’il réussit quand même à emballer une belle Mexicaine (on ne se refait pas), son personnage est là pour accomplir une action peu glorieuse (les motifs du père étant plus troubles que ce que l’on pourrait croire) et son principal mérite sera de redonner confiance à un enfant peu épargné par la vie qui joue les durs à cuire pour tenter de ne pas se laisser atteindre – ce qui, bien évidemment, redonnera également confiance au vieux bougon.

La réalisation, assez simple mais efficace, quoique pas aussi inspirée que nombre de ses films, nous fait par ailleurs bien comprendre que l’heure n’est plus aux westerns. Celui qui était autrefois impitoyable cherche à présent un agréable refuge où il pourra couler ses vieux jours en toute quiétude. La dernière scène apparaît d’ailleurs en ce sens comme une variante lumineuse à la conclusion mélancolique et fantomatique de Million Dollar Baby. Pour ses multiples références introspectives à sa filmographie, Cry Macho de Clint Eastwood mérite d’être vu.

On pourra savourer le film si on peut l’apprécier pour ce qu’il est, y compris dans ses partis pris émotionnels un peu faciles, en tenant compte que le cinéaste ne cherche plus à faire un dernier grand film – en a-t-il seulement besoin ? Et, quoique mineur, il y a quelque chose de touchant à voir l’artiste sortir un peu de sa mélancolie et s’ouvrir de nouveau à une forme de joie de vivre au sein de sa filmographie.

Après tout, son archétype de personnage solitaire, frustre de prime abord et hanté par les regrets car absent de la vie de ses enfants, était devenu, avec le temps, presque une sorte de gimmick qu’il déclinait inlassablement. Ici, c’est un peu comme s’il offrait enfin un happy end à son alter ego – et acceptait la fragilité due à son âge sans en faire un drame. Comme si le temps mettait enfin du baume à son cœur. Le cri final du coq (qui pourrait sembler hautement ridicule pour un film au titre pareil) devient ainsi un chant de victoire finalement assez émouvant.

Article écrit par

Cécile Desbrun est une auteure spécialisée dans la culture et plus particulièrement le cinéma, la musique, la littérature et les figures féminines au sein des œuvres de fiction. Elle crée Culturellement Vôtre en 2009 et participe à plusieurs publications en ligne au fil des ans. Elle achève actuellement l'écriture d'un livre sur la femme fatale dans l'œuvre de David Lynch. Elle est également la créatrice du site Tori's Maze, dédié à l'artiste américaine Tori Amos, sur laquelle elle mène un travail de recherche approfondi.

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