[Playlist] 25 chansons pour la Journée de la Femme

capture clip "The Man" de Taylor Swift.

Notre sélection de chansons féministes et autour des droits des femmes

En ce mercredi 8 mars 2023, nous fêtons la Journée Internationale des Droits des Femmes. Une journée qui trouve ses racines dans les luttes pour les droits des femmes qui ont eu lieu dès le début du XXème siècle afin de réclamer l’égalité des droits, et notamment de meilleures conditions de travail et le droit de vote. Cette journée est officiellement créée en 1975 par l’Organisation des Nations Unies et, depuis quelques années, cette date est très médiatisée et donne l’occasion de parler des avancées des droits des femmes dans le monde, mais aussi, de manière plus générale, pour célébrer une vision libre, multiple et complexe de la femme, loin des clichés et de certains biais aussi insidieux que tenaces.

La musique, qu’il s’agisse de la pop mainstream, de la scène alternative ou encore de la chanson française [ndlr : les autres genres, de la soul au R’n’B en passant par la country, sont aussi concernés, mais non représentés dans cette playlist], regorge bien entendu de chansons féministes célébrant les femmes dans toute leur pluralité et dénonçant les préjugés et les violences qui leur sont faites. Voici une sélection improvisée, forcément incomplète, à la subjectivité assumée, partant de la légèreté à des sujets plus graves.

Note de l’auteure : pour les chansons en anglais, je me suis permis de traduire directement en français certains passages des paroles.

« M’envoyer des fleurs », Sandrine Kiberlain (2005)

Extrait de son album Manquait plus qu’ça, « M’envoyer des fleurs » de Sandrine Kiberlain (co-écrit avec Pierre Souchon, fils d’Alain, également crédité sur d’autres titres du CD) n’est pas (on vous voit venir !) une ode au nombrilisme, mais plutôt une invitation faite aux femmes à stopper l’autocritique incessante pour s’autoriser à penser à elles et à se faire du bien, ne serait-ce qu’un moment. C’est léger et ça fait du bien.

En équivalent pop anglosaxon récent (en plus catchy), on pourra aussi citer le sympathique « Flowers » de Miley Cyrus.

« Plurielle », Brigitte (2014)

Le duo Brigitte a toujours revendiqué une approche féministe et féminine à travers sa pop aux accents rétro souvent remplie d’humour. Ce morceau invite avec légèreté et sensualité à l’exploration d’une féminité plurielle, loin des cases prédéfinies, placée sous le signe d’une liberté que chacune est en droit de définir pour elle-même dans tous les domaines de sa vie. « Oser choisir de ne pas choisir », susurrent elles…

« The Lady is a Vamp », Spice Girls (1998)


Dernier titre de Spiceworld, le second album du girls band anglais le plus populaire de tous les temps, « The Lady is a Vamp » est une chanson aux accents de cabaret rétro célébrant là aussi les femmes à travers la pop culture sous toutes leurs multiples facettes. Les paroles enjouées sont remplies de références, de Marilyn Monroe et Jackie Kennedy à Olivia Newton-John dans Grease, en passant par Twiggy, les James Bond Girls ou encore les Drôles de Dames.

« Bitch », Meredith Brooks (1997)


Unique tube de Meredith Brooks, « Bitch » reste un hymne pop féministe efficace, dont les paroles n’ont pas pris une ride. Là encore, il s’agit d’une invitation faite aux hommes à considérer les femmes dans toute leur complexité et tous leurs paradoxes, loin des paradigmes faciles (la Vierge ou la Pute, en gros), même si cela exige, pour les uns comme pour les autres, à accepter la vulnérabilité que cela sous-entend.

« Rattlesnakes », Tori Amos (2001)


Il s’agit en réalité là d’une reprise par Tori Amos (extraite de son album Strange Little Girls dans lequel elle reprenait des chansons d’artistes masculins parlant des femmes) d’un tube de Lloyd Cole de 1984. Hymne féministe à la perspective 100% américaine, les paroles citent Eva Marie Saint dans Sur les quais, mais aussi Simone de Beauvoir et décrivent une femme indépendante, forte et vulnérable à la fois, qui tente de faire fi de ces « serpents à sonnettes [qui] pensent qu’une femme a besoin d’un flingue par les temps qui courent » malgré ses doutes et les difficultés rencontrées.

« King », Florence + the Machine (2022)


Single-phare de son album Dance Fever inspiré du conte (et du film) Les chaussons rouges, « King » parle des désirs contraires de Florence Welch, tiraillée entre l’artiste et la femme qu’elle est, mais qui s’affirme avant tout comme une créatrice, « ni mère, ni épouse », qui a besoin de vivre (et de souffrir) pour pouvoir nourrir son art, même si cela exige d’elle des sacrifices. « Je suis Roi », chante-t-elle dans le refrain de la chanson. Le clip, lui, joue avec l’archétype de la Vierge pour mieux le détourner à travers une représentation caustique à prendre au second degré (non messieurs, on ne vous fera pas le coup du lapin !).

« Talula », Tori Amos (1996)


Ode à l’anima, à l’élan de vie féminin dans toute sa splendeur face à toutes les épreuves endurées par les femmes au cours de l’histoire, « Talula » (ici présentée dans sa version single), est un morceau au clavecin particulièrement enjoué de Tori Amos présent sur son 3ème album studio, Boys for Pele. Les paroles, aussi cryptiques qu’un poème surréaliste, font référence à la décapitation d’Ann Boleyn pour cause de stérilité, aux scandales sexuels des hommes politiques, au viol, à la religion (Marie-Madeleine et Jésus) et à la culture amérindienne (Talula est un prénom amérindien), pillée par les colons.

« Mariners Apartment Complex », Lana Del Rey (2018)


Ce single fait partie des chansons que l’on pourrait qualifier de « positives » de Lana Del Rey. La mélancolie cède ici la place à un élan romantique assez serein et la chanteuse se livre à une véritable ode à la vulnérabilité, qu’elle distingue de la faiblesse. Détrompant l’homme qu’elle aime qu’elle n’est pas une « bougie au vent » malgré sa tristesse et sa gentillesse, elle le rassure pour l’encourager à faire le grand saut avec elle et à s’engager malgré ses hésitations ou le regard des autres.

La métaphore autour de la navigation permet à l’artiste de renverser les rôles (tout en faisant un clin d’œil à l’un des titres les plus connus de son idole Leonard Cohen) : elle se propose de prendre la relève et de le guider à bon port s’il se perd. « Si tu perds ton chemin, prends ma main/Tu es perdu en mer, je ramènerai ton bateau jusqu’à moi/Ne regarde pas trop loin, reste où tu es, je suis là/Je suis ton homme ».

« 32 Flavors », Ani DiFranco (1995)


Relativement peu connue en France, Ani DiFranco est une auteur-compositrice-interprète italo-américaine phare de la scène alternative depuis le début des années 90. Féministe, bisexuelle et militante, son œuvre particulièrement prolifique compte de nombreuses pépites. Dans sa veine féministe, « 32 Flavors » reste l’un de ses titres les plus connus. Là encore, il s’agit de déjouer les clichés et les craintes refoulées de certains hommes, qui peuvent se sentir en danger dès lors que les femmes sortent des cases pour jouer sur le même terrain qu’eux.

« Regardez de plus près/je ne me tiens pas entre vous et votre ambition/Je suis une femme étendard sans rien à vendre/J’ai 32 parfums et quelques autres encore » ; « Je n’ai jamais essayé de donner un sens à ma vie en vous rabaissant/(…) Je ne prétends pas être une sainte/Je ne veux pas vivre ainsi ».

« Une sorcière comme les autres », Anne Sylvestre (1975)


Classique de la chanson française, « Une sorcière comme les autres » d’Anne Sylvestre reste un titre féministe indétrônable. Convoquant les multiples images, archétypes et représentations de la femme à travers l’histoire ou l’art à travers le regard des hommes, l’artiste parle aux peurs masculines et livre un véritable cri du cœur pour être considérée comme une égale, et non une menace à soumettre.

« J’étais celle qui attend/Mais je peux marcher devant/J’étais la bûche et le feu/L’incendie aussi je peux/J’étais la déesse mère/Mais je n’étais que poussière/J’étais le sol sous vos pas/Et je ne le savais pas/Mais un jour la terre s’ouvre/Et le volcan n’en peux plus/Le sol se rompt, on découvre des richesses inconnues/La mer à son tour divague de violence inemployée/Me voilà comme une vague vous ne serez pas noyé ».

« Résiste », France Gall (1981)


Bien que le tube de France Gall puisse parler à tout le monde et ne soit pas à proprement parler un hymne féministe, il est bien difficile de ne pas entendre dans les paroles un formidable encouragement à l’affirmation de soi et à la recherche d’une vie à la hauteur de nos désirs et espoirs envers et contre tout – ce qui peut bien entendu parler à la cause des femmes et au fait de « sortir des cases » et de ce que l’on attend de nous.

« The Man », Taylor Swift (2019)


A écouter à tout prix en regardant le clip humoristique et percutant (réalisé par l’artiste elle-même et dans lequel elle joue l’Homme en question), « The Man » de Taylor Swift s’attaque aux double standards présents au sein de la société et qui font que des comportements et attitudes similaires ne sont pas jugés de la même manière si l’on est un homme ou une femme. En gros : une femme de caractère, de pouvoir ou encore séductrice sera souvent jugée négativement ou, du moins, plus négativement qu’un homme, ce qui est perçu comme des qualités chez l’un se transformant en défauts chez l’autre.

« Ils diraient que j’ai assuré/que j’ai fait mon taff/Ils ne dodelineraient pas de la tête en remettant en cause le fait que je le mérite vraiment/Ce que je porte/Et si je me montrais malpolie/Tout cela pourrait être dissocié de mes bonnes idées et de mes actions stratégiques/Et ils porteraient un toast à mon nom/En disant « c’est le jeu »/Je serais comme Leo à Saint Tropez ».

« Mad Woman », Taylor Swift (2020)


Extrait de l’album Folklore (premier album folk de l’artiste), « Mad Woman » de Taylor Swift s’en prend au cliché de la femme hystérique clouée au pilori – notamment dans les médias. Position dans laquelle la star de la pop s’est retrouvée en 2016 suite à son différent avec Kanye West avant d’être attaquée, plus tard, par la porte-parole de Donald Trump suite aux prises de position de l’artiste, qui s’inquiétait de la remise en question du droit des femmes dans l’état du Tennessee où elle a lancé sa carrière.

Outre la dimension autobiographique, les paroles font mouche et montrent comment il est facile de faire passer une femme pour une folle hystérique à partir de rien, juste en utilisant des procédés malhonnêtes (provocation et rhétorique, notamment) pour la faire réagir pour mieux l’associer à ce cliché sexiste éculé qui veut que la colère et les femmes ne font pas bon ménage alors qu’elle serait signe de puissance et de révolte chez l’homme.

« Chaque fois que tu me traites de folle/Je deviens un peu plus folle, que dis-tu de ça ?/Et chaque fois que tu me dis que j’ai l’air en colère/Je me mets un peu plus en colère/Et il n’y a rien de tel qu’une folle hystérique/ »Quel dommage qu’elle ait perdu la tête ! »/Personne n’aime une folle hystérique/C’est toi qui l’a rendue comme ça/Et tu donneras des coups de bâton à cet ours jusqu’à ce qu’il sorte ses griffes/Et tu trouveras toujours quelque chose pour lui passer un nœud coulant autour du cou/Et il n’y a rien de tel qu’une folle hystérique ».

« Toc Toc Toc », Zazie (2004)


Avec un certain humour (dans les paroles comme dans le clip), Zazie revisite Le petit chaperon rouge et « déconstruit » comme on dit, le mythe du bad boy, qui attire tant de femmes dès l’adolescence. Car, finalement, si on n’apprend pas véritablement aux filles à affirmer leur désir à l’adolescence (même si, oui, les choses changent et évoluent), elles se tournent vers des hommes qui possèdent à leurs yeux cette puissance sexuelle qu’elles recherchent mais s’interdisent pour elles-mêmes… mais restent en fin de compte dans une position passive. Ainsi, la narratrice de la chanson ne va pas chercher son loup, mais se contente de l’attendre, comme elle attendait le prince charmant enfant.

« Depuis que le monde est monde,/On nous le dit/S’il te fait les yeux doux/Ma fille tu t’enfuis/Et s’il hurle dans ta cour/N’ouvre surtout pas !/Toc toc toc/ mais qui est là?/Le loup qui te mangeras/Mais si la fille en a peur/La femme en rêve/Dans la forêt, nue/Qu’un sauvage nous enlève/Nos corps s’abandonnent/Au soleil qui se lève/Toc toc toc mais qui est là/Le loup qui te mangeras/(…)Toc toc toc, mais qui est là?/Je n’attendais plus que toi/Toc toc toc, si tu es là/Entre donc et mange-moi ».

« Petit bonhomme », Anne Sylvestre (1977)


Un titre humoristique d’Anne Sylvestre sur la tendance de certains messieurs à prendre les femmes pour bobonne. Les paroles se passent de commentaire.

« Original Sinsuality »,  Tori Amos (2005)


La femme a souvent été ramenée au péché originel dans la religion chrétienne et, qu’on le veuille ou non, même si la croyance et la pratique religieuse ont évolué et ne sont plus aussi prégnantes dans la société actuelle (et que tous les chrétiens sont loin d’être des bigots), il n’en demeure pas moins, dans l’inconscient collectif, des archétypes familiers tels que la tentatrice, la Vierge et la Pute auxquels les femmes peuvent encore être associées de manière insidieuse dans certaines circonstances et qui font qu’elles seront jugées différemment. Et, de manière plus simple, ce paradigme a fait peser beaucoup de culpabilité sur les femmes en ce qui concerne leur désir et leur sexualité.

D’où cette évocation religieuse de Tori Amos vue à travers un point de vue ouvertement gnostique sur son album The Beekeeper, et dans lequel cette fille de pasteur méthodiste (progressiste) transforme le péché originel (original sin) en « sensualité originelle » à travers un habile jeu de mots  (original sinsuality). A noter que dans les écrits gnostiques, goûter à l’arbre de la connaissance n’est pas un péché, mais un acte nécessaire pour que l’homme s’arrache à la dépendance de Dieu et puisse accéder au libre arbitre… même si la connaissance est symboliquement « noire » et qu’avec elle on sort de « l’ignorance bénie » dans laquelle on n’a pas besoin de se poser de questions.

Pour la petite histoire, c’est au corpus des écrits gnostiques retrouvés à Nag Hamadi en Egypte en 1945 qu’appartient l’Evangile de Marie (Madeleine), qui inspira cet album à Tori Amos, mais aussi… le Da Vinci Code à Dan Brown – qui avait aussi pompé avec une certaine inventivité la théorie du complot dans laquelle étaient tombés les auteurs de l’essai best seller New Age The Holy Blood and the Holy Grail dans les années 80 suite à une arnaque fomentée par l’escroc et catholique d’extrême-droite Pierre Plantard, mais c’est une autre histoire…

« Voicemail for Jill », Amanda Palmer (2017)


Amanda Palmer signe avec « Voicemail for Jill » un plaidoyer bouleversant contre la stigmatisation liée à l’avortement et pour un meilleur accompagnement de la détresse qui peut en découler. Dans les paroles, l’artiste laisse un message sur le répondeur d’une amie qui va se faire avorter et témoigne de son empathie pour elle.

« Personne ne te célébrera/Personne ne t’apportera du gâteau/Et personne ne t’inondera de fleurs/Le docteur ne te félicitera pas/Personne sur ce trottoir ne te criera en pleine tête que ton cœur à toi aussi compte » ; « Tu n’as pas besoin de donner la ‘bonne’ explication/Tu n’as pas besoin d’implorer pardon ou de prier pour ta rédemption/Et tu n’as pas besoin d’un/tribunal dans ta tête/Où tu fais office de juge/accusée, avocate et témoin/C’est un deuil étrange, mais s’en est un/Regarde toutes les femmes dans la rue ».

« Rather Than Talking », HollySiz (2018)


Surtout pour le clip montrant des ouvrières d’une usine textile menées par Cécile Cassel alias HollySiz se rebeller et mettre la direction de l’usine à genoux. La chanson en elle-même parle des regrets autour d’une relation amoureuse qui ne se concrétisera pas et restera sans doute amicale en raison des peurs de l’autre personne ou du regard des autres. Une thématique qui n’a pas grand chose à voir avec le clip ni avec le féminisme, donc.

Cependant, il est intéressant de noter comment le réalisateur Thibault Dumoulin a intelligemment tiré partie d’une toute petite partie, assez simple, des paroles (« Plutôt que parler, parler, parler, j’aurais mieux fait de marcher, marcher, marcher et fourrer ma langue dans ta bouche/même si tu penses que ce serait mal ») pour créer cette histoire bien plus élaborée de révolte ouvrière, où c’est l’élan amoureux pour une amie qui pousse le personnage incarné par la chanteuse à bousculer l’ordre établi et à entraîner ses collègues avec elle.

« Silent All These Years », Tori Amos (1992)


Premier vrai single de Tori Amos, « Silent All These Years » n’est pas spécifiquement une chanson féministe mais reste, par sa thématique, un morceau poignant qui peut faire écho à l’expérience de nombreuses femmes. Avec ses paroles aux images poétiques propres à son univers, l’artiste américaine y parle du sentiment de libération qui naît du fait de briser le silence après s’être longtemps autocensuré. Pour cette raison, elle avait d’ailleurs choisi de ressortir cette chanson en 1997 au profit de l’organisation RAINN qu’elle a aidé à co-créer en 1994 et qui met en contact les victimes de violences sexuelles et leur entourage avec des structures adaptées près de chez elles. Le titre en lui-même n’évoque pas directement les violences sexuelles et peut s’appliquer à de nombreuses situations, mais parle de résilience et d’affirmation de soi et du fait de trouver sa voix (avec une jolie référence à La petite sirène) avec une rare acuité.

« Excuse-moi, mais pourrais-je être toi un moment ?/Mon chien ne mordra pas si tu restes assis sans broncher/Il y a l’Antéchrist dans la cuisine qui me hurle encore après/Oui, j’entends ça de là/J’ai encore été sauvée par la benne à ordures/J’ai quelque chose à dire tu sais mais, rien ne sors/Oui, je sais ce que tu penses de moi, tu ne la fermes jamais/Oui, j’entends bien/Mais et si j’étais une sirène/Dans ses jeans à lui avec son nom à elle encore dessus/Hé, mais cela m’est égal/Car parfois, oui parfois, j’entends ma voix/Et elle était là, silencieuse toutes ces années ».

« Notes pour trop tard (réécriture) x Le malamour », Barbara Pravi (2019)


Révélation du spectacle musical Un été 44 en 2016, Barbara Pravi est l’une des jeunes artistes les plus talentueuses de sa génération. Si elle est connue pour son titre « Voilà », qu’elle avait présenté à l’Eurovision en 2021, « Notes pour trop tard (réécriture) x Le malamour » représente un message puissant pour les jeunes filles et jeunes femmes d’aujourd’hui. Avec des mots simples et directs, la chanteuse y encourage les adolescentes à se faire confiance et à s’affirmer pour s’accomplir malgré les embûches qu’elles pourront rencontrer en chemin et certaines cases dans lesquelles la société veut encore faire rentrer les femmes. Dans la seconde partie, le titre bifurque pour s’adresser aux femmes qui vivront des relations de couple abusives, qu’il s’agisse de violence psychologique et verbale ou physique.

« Petite, t’as le sentiment d’être différente, tu marches pas dans les clous, c’est peut-être toi qui a raison et les autres qui sont fous/Après tout qui crée les codes et les tabous ?/Qui a dit que ceux qui rentraient pas dans le cadre deviendraient rien du tout » ; « S’il te fout une claque, faudra que tu te fasses la malle/S’il te touche alors que tu veux pas, faudra pas que tu trouves ça normal/L’amour et la violence ne font pas bon ménage, surtout laisse rien passer, pour pas tomber dans l’engrenage/Il n’y a pas d’exception, pas d’excuses, c’est que du mytho/Une fois, deux fois, trois fois, n’attends pas celle de trop/(…) Et y a pas que les gestes qui feront des dégâts/Les mots seront comme des balles qui resteront bloquées en toi/Laisse personne croire que c’est de ta faute, que tu as mérité la violence ».

« What About? », Janet Jackson (1997)


Présente sur l’album culte Velvet Rope de Janet Jackson , « What About? » est sans conteste l’un des titres les plus personnels de la popstar américaine, puisqu’elle y parle sans faux fuyants des violences conjugales qu’elle a subies aux côtés de son premier mari (le chanteur du groupe des années 80 DeBarge), qu’elle avait épousé à 18 ans pour fuir le cocon familial. Dans cette chanson, elle se souvient des événements avant de laisser éclater sa colère refoulée dans le refrain face au comportement pervers de cet ex-conjoint qui n’acceptait pas de faire face à son comportement. Cette colère qui lui permettra de partir après être restée trop longtemps silencieuse et sous contrôle.

« Nous marchions le long de la plage/Quelle belle nuit au clair de lune/Il me prit la main et m’embrassa/Il me dit : « Je veux passer ma vie avec toi/je veux que tu deviennes ma femme »/Mais alors j’ai pensé/Que fais-tu des fois où tu m’as menti ?/Que fais-tu des fois où tu disais que personne ne voudrait de moi ?/Que fais-tu de toute la merde que tu m’as fait subir ?/Que fais-tu de ça ? Que fais-tu de ça ?/(…) Que fais-tu des fois où tu m’as frappée au visage ?/Que fais-tu des fois où tu as continué/alors que je te disais « arrête je t’en supplie » ?/(…) Que fais-tu des fois où tu avais honte de moi ?/Que fais-tu des fois où tu disais que tu ne l’avais pas baisée/qu’elle t’avait juste sucé ? » ; « Mon coeur battait à tout rompre/Mais l’heure était venue/d’arrêter de laisser les murmures de mon cœur me contrôler/et imposer à mon esprit qui hurlait ma conduite/Je l’ai regardé droit dans les yeux, et je lui ai dit… ».

« ’97 Bonnie & Clyde », Tori Amos (reprise d’Eminem) (2001)


Reprendre le morceau le plus violent et polémique du rappeur Eminem, il fallait oser le faire, Tori Amos l’a fait sur son album Strange Little Girls ! Sans changer un seul mot des paroles du titre d’origine (dont elle a simplement retiré le tout dernier couplet), elle change, par son chant et les arrangements qui créent une atmosphère oppressante et anxiogène, le point de vue du morceau. Ce n’est plus le père violent qui vient d’égorger sa femme devant leur petite fille qui s’exprime, mais bien la mère, qui tente de rassurer leur enfant alors qu’elle agonise dans le coffre de la voiture. Sans doute l’un des exemples les plus impressionnants de changement de perspective d’une chanson et l’une des reprises les plus fortes de Tori Amos.

Quoi que l’on pense du titre d’origine – simple fantasme à valeur de catharsis pour le rappeur ou bien apologie des violences conjugales par un artiste déjà condamné pour des faits de violence sur son ex-femme – rappelons tout de même que le morceau d’Eminem était particulièrement enjoué dans sa musique et ses arrangements, samplant même le tube « Just the Two of Us » de Will Smith dédié à son fils. Pour la petite histoire, si Tori Amos pu reprendre en version studio ce titre aussi facilement, c’est tout simplement parce qu’elle avait à l’époque le même avocat qu’Eminem. Pratique !

« Chérie, ton papa t’aime/Et je serai toujours là pour toi/quoi qu’il arrive/Tu es tout ce que j’ai au monde/Je ne t’abandonnerai jamais/Personne en ce bas monde ne t’arrachera jamais à moi/Je t’aime » ; « Et voilà Maman qui fait plouf dans l’eau/Plus de disputes avec Papa, plus d’ordre de restriction/(…) Envoie-lui des baisers/Dis à Maman que tu l’aimes »

« Me and a Gun », Tori Amos (1992)


Tout premier extrait de son premier album solo Little Earthquakes sorti en Angleterre avant la sortie du disque complet, « Me and a Gun » fut l’un des derniers titres écrits par l’artiste pour cette œuvre devenue culte. L’artiste y parle à capella de ce qu’elle a ressenti et des pensées contradictoires se bousculant dans sa tête au moment du viol qu’elle a subi à l’âge de 22 ans aux mains du client d’un bar où elle jouait et qu’elle avait proposé de raccompagner en voiture. Après avoir gardé sous cloche ce traumatisme pendant 7 ans, c’est finalement la vision du film Thelma et Louise au cinéma qui le fit ressurgir et la poussa à mettre en mots ce qu’elle ressentait. Toujours de manière quelque peu imagée et métaphorique par moments, et terriblement concrète et douloureuse à d’autres. Le passage autour de Jésus (« je ne pense pas que tu seras de retour dans 3 jours, alors choisis bien ») est là pour rappeler que, en situation de danger psychologique et physique, une victime peut très bien rester passive et figée par peur (c’est ce qu’on appelle la sidération) et non parce qu’elle est consentante. Un morceau forcément inconfortable, mais nécessaire.

« C’était moi et un flingue/et un homme sur mes reins/Et je chantais des cantiques/pendant qu’il déboutonnait son pantalon/Vous pouvez rire, c’est assez drôle/Les choses qui vous passent par la tête dans des moments pareils/Comme « je n’ai jamais vu les Barbades/alors je dois m’en sortir »/Oui je portais cette chose rouge et moulante/Cela signifie-t-il que je devrais écarter les cuisses/pour toi, tes amis/ton père ou Mr Ed ? »

« Douce maison », Anne Sylvestre (1968)


Autre chanson sur le viol, en français cette fois-ci, au plus fort de la révolution sexuelle, « Douce maison » reste un exemple dans le registre des chansons sur les violences faites aux femmes et leur dénonciation. Ici, la maison sert de métaphore, non seulement au corps de la femme, mais aussi, tout simplement, à son intégrité aussi bien psychique que physique, puisque c’est cela qui est attaqué par l’agresseur par cet acte de violence et de haine.

« La maison, depuis ce crime, n’a plus d’âme ni de nom/Mais elle n’est pas victime, c’est de sa faute, dit-on/Il paraît qu’elle a fait preuve d’un peu de coquetterie/Avec sa toiture neuve et son jardin bien fleuri/Non, non, je n’invente pas/Mais je raconte tout droit/D’ailleurs, une maison sage ne reste pas isolée/Celles qui sont au village se font toujours respecter/Quand on n’a pas de serrure, il faut avoir un gardien/C’est chercher les aventures que de fleurir son jardin »

« Aux armes citoyennes », Zazie (2001)


Enfin, pour conclure cette playlist, « Aux armes citoyennes » de Zazie, plaidoyer contre les violences faites aux femmes partout à travers le monde, en incluant bien sûr les hommes à cette lutte.

« A ceux qui pensent/Que Eve est seulement/Une moitié d’Adam/A ceux qui disent/Qu’elle est la mère/De tous les vices/A ceux qui se permettentD’être le seul maître/Après Dieu/A ceux qui rient/A celles qui pleurent/A ceux qui vont/Libres comme l’air/A celles qui se terrent/A ceux qui ontLe droit de dire/Elles, de se taire/A ceux qui prennent la vie/De celles qui donnent la vie/A ceux qui rient/De celles qui pleurent/Aux armes, citoyennes/Nos armes seront/Les larmes qui nous viennent/Des crimes sans nom/Aux hommes qui nous aiment/Ensemble, marchons/Et au Diable les autres »

Bonus tracks

Deux tubes de soul et de R’n’B, très connus, mais incontournables évidemment, par Aretha Franklin et Lauryn Hill.

Article écrit par

Cécile Desbrun est une auteure spécialisée dans la culture et plus particulièrement le cinéma, la musique, la littérature et les figures féminines au sein des œuvres de fiction. Elle crée Culturellement Vôtre en 2009 et participe à plusieurs publications en ligne au fil des ans. Elle achève actuellement l'écriture d'un livre sur la femme fatale dans l'œuvre de David Lynch. Elle est également la créatrice du site Tori's Maze, dédié à l'artiste américaine Tori Amos, sur laquelle elle mène un travail de recherche approfondi.

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