Un conte toujours aussi indispensable
Parmi les auteures rentrées au Panthéon de la littérature, Beatrix Potter tient une place toute particulière. Bien connue pour ses contes pour enfants, cette femme née dans un milieu très bourgeois aura trouvé, dans les personnages anthropomorphiques de ses écrits, un véritable échappatoire à un quotidien qu’elle ressentait comme peu agréable. Parmi ses écrits les plus renommés, on trouve évidemment Jeannot Lapin, que les éditions Gallimard Jeunesse a le bon goût d’inviter dans sa très recommandée collection L’heure des histoires (La baleine et l’escargote, Un papa sur mesure, Il faudra) L’occasion de renouer avec l’un des univers les plus mémorables de l’histoire de la littérature pour enfants.
Jeannot Lapin, c’est l’histoire de ce petit personnage qui donne son nom au titre. Un jour, alors qu’il profite de l’absence des MacGregor, le voilà pris de l’envie de rendre visite à ses cousins, lesquels habitent dans les bois, juste derrière le jardin de la famille citée plus haut. C’est alors que Jeannot Lapin tombe nez à nez avec Pierre, son cousin (qui, d’ailleurs, fait l’objet d’un autre conte de Beatrix Potter). Ce dernier a perdu ses vêtements, et se retrouve emmitouflé d’un grand mouchoir de coton rouge. Il explique qu’il a été chassé du jardin et, dans sa fuite, a perdu son manteau et ses chaussures. Voilà les deux cousins en quête des habits volés, qu’ils retrouveront sur un épouvantail. Une aventure qui les feront passer par le jardin des MacGregor, au devant de quelques dangers…
Des illustrations charmantes au possible
Le récit de Jeannot Lapin a cela de formidable qu’il reste simple à aborder (tout en faisant preuve d’un langage parfaitement soutenu), tout en abordant des problématiques qui donneront au petit public sa dose d’aventures et de moralité. Les lapins, clairement anthropomorphiques, allant jusqu’à ressentir le besoin de s’habiller, sont au cœur de l’histoire. Ils sont utilisés afin de mieux évoquer non seulement les dangers d’une exploration irréfléchie, mais aussi le besoin d’avoir recours aux parents, à la famille, dans le but de donner les limites à l’activité imprudente des enfants. Béatrix Potter, et son œuvre, témoigne d’un temps qui donnait de l’importance à l’éducation au sein de la cellule familiale, ce qui n’est pas un mal…
Jeannot Lapin est aussi l’occasion de se rappeler à quel point les illustrations, elles aussi signées Beatrix Potter, sont tout simplement enchanteresses. Le coup de pinceau, admirablement précis, favorise l’anthropomorphisme de ces petits êtres bondissants, ce qui termine de provoquer une projection fine du jeune public dans le récit. Le rendu est doux, les couleurs choisies à la perfection : c’est un véritable plaisir à chaque page. Les yeux des différents personnages, notamment, avec un grand effort sur la lueur qui les habitent, nous ont particulièrement impressionnés. S’en dégage, globalement, une forte poésie, qui semble être fait pour marquer, aussi bien le bambin que l’adulte qui l’accompagne. C’est donc un classique de plus pour la collection L’heure des histoires, un indispensable pour chaque bibliothèque jeunesse digne de ce nom.
Jeannot Lapin, écrit et illustré par Beatrix Potter. Aux éditions Gallimard Jeunesse, collection L’heure des histoires, 40 pages, 5.50 euros. De 3 à 6 ans. Paru le 9 février 2017.