[Analyse] J.R.R. Tolkien et le Facteur Cheval (1/2) – Le professeur et le paysan

Buste de l'écrivain J.R.R. Tolkien et photographie du Facteur Cheval.
Buste de l’écrivain J.R.R. Tolkien et photographie du Facteur Cheval.

Depuis que le Palais idéal du Facteur Cheval (à Hauterives, Drôme) a proposé avec l’exposition Fantaisies héroïques de croiser l’œuvre de Ferdinand Cheval et celles de l’écrivain du Seigneur des Anneaux J. R. R. Tolkien, les parcours de ces deux créateurs n’ont cessé de se croiser dans ma tête… Le petit bourgeois et professeur Tolkien, créateur de la Terre du Milieu ; le Facteur Cheval d’origine paysanne bâtissant son monde dans son jardin : autant de choses distinguent et rapprochent ces deux personnalités extraordinaires.

C’est ce que nous allons explorer dans cet article, qui développe les points déjà évoqués dans notre critique de l’exposition Fantaisies héroïques et qui mérite d’être complété par une lecture de biographies de J.R.R. Tolkien (1892-1973) et de Ferdinand Cheval (1836-1924) pour plus de précisions et d’analyse. Pour vous encourager à creuser le sujet, cet article en deux parties est illustré de photos de deux superbes livres : Le Palais idéal du Facteur Cheval, Quand le songe devient la réalité (A.R.I.E. Éditions) et Tolkien, Créateur de la Terre du Milieu (Hoëbeke). Ce sont nos sources pour toutes les informations de ce texte, ainsi que des ouvrages passionnants.

Les superbes livres "Tolkien, Créateur de la Terre du Milieu" (Hoëbeke) et "Le Palais idéal du Facteur Cheval, Quand le songe devient la réalité" (A.R.I.E. Éditions)
Les superbes livres Tolkien, Créateur de la Terre du Milieu sous la direction de Catherine McIlwaine (Hoëbeke) et Le Palais idéal du Facteur Cheval, Quand le songe devient la réalité de Jean-Pierre Jouve, Claude Prevost et Clovis Prevost (A.R.I.E. Éditions) © Éditions Hoëbeke / Éditions A.R.I.E.

Si j’ai voulu me lancer dans cet article (en deux parties), c’est parce qu’à titre personnel je me suis souvent interrogé sur les conditions qui m’ont permis de devenir ce que je suis, pour le mieux et le moins bien. Je suis issu, à titre personnel, d’un milieu très modeste et éloigné du milieu culturel dans lequel je baigne actuellement. Je crois que c’est une réflexion importante à mener sur soi. Gardons en tête cette question : dans quelle mesure Tolkien et Cheval ont-ils été déterminés, privilégiés ou empêchés par leur situation sociale pour réaliser leurs œuvres ? Et une autre question, en filigrane : quelle est la part de la volonté ? Enfin : qu’est-ce que le mérite ?

Le Palais idéal du Facteur Cheval, vu depuis l'ancienne chambre de son créateur. © Culturellement Vôtre
Le Palais idéal du Facteur Cheval, vu depuis l’ancienne chambre de son créateur. © Culturellement Vôtre

Deux œuvres, deux origines, deux classes sociales

Plus que la différence culturelle liée aux origines françaises ou anglaises des deux artistes, c’est la différence de classe sociale qui a retenu notre attention, car elle détermine des manières d’être face à l’art différentes, selon que l’on est un facteur d’origine paysanne (Cheval) ou un universitaire issu de la petite bourgeoisie (Tolkien). Mais, comme nous le verrons, l’un et l’autre ont rencontré des obstacles pour réaliser leurs œuvres, des obstacles produits par leur classe sociale. Bien sûr, pour qu’une telle étude soit rigoureuse, il aurait fallu que les deux artistes soient du même pays et strictement contemporains, mais aussi pratiquant le même art. Mais ceci ne prétend pas être une étude de sociologie, plutôt la poursuite d’un dialogue entre deux œuvres et deux artistes, initié par l’exposition Fantaisies héroïques.

Le professeur et écrivain J.R.R. Tolkien entouré de ses livres. - Extrait du livre Tolkien, Créateur de la Terre du Milieu © Éditions Hoëbeke
Le professeur et écrivain J.R.R. Tolkien entouré de ses livres. – Extrait du livre Tolkien, Créateur de la Terre du Milieu © Éditions Hoëbeke
Ferdinand Cheval, son épouse Claire-Philomène Richaud et leur fille Alice (toutes deux décèderont avant lui, déjà veuf d'un premier mariage). - Extrait du livre Le Palais idéal du Facteur Cheval, Quand le songe devient la réalité © Éditions A.R.I.E.
Ferdinand Cheval, son épouse Claire-Philomène Richaud et leur fille Alice (toutes deux décèderont avant lui, déjà veuf d’un premier mariage). – Extrait du livre Le Palais idéal du Facteur Cheval, Quand le songe devient la réalité © Éditions A.R.I.E.

Commençons par le plus frappant : Cheval comme Tolkien ont construit une œuvre monumentale par son ampleur et son impact culturel, profondément originale même si elle se base sur des éléments imaginaires déjà connus. L’un et l’autre, pourtant, ne peuvent être plus opposés dans leur rapport à la culture, lié à leurs origines sociales respectives. Au contraire de Ferdinand Cheval, J.R.R. Tolkien est issu du milieu social dominant la culture britannique et européenne, bien qu’étant de petite bourgeoisie. Son père Arthur Reuel avait ainsi été nommé à la tête de l’agence de la Banque d’Afrique à Bloemfontein (Afrique du Sud). Mais comme le Facteur Cheval, il fut un homme de rigueur et de passion, qui cultivait l’état d’esprit familial d’artisans, attachés semble-t-il au bel ouvrage.

Portrait de la famille Tolkien en Afrique du Sud. - Extrait du livre Tolkien, Créateur de la Terre du Milieu © Éditions Hoëbeke
Portrait de la famille Tolkien en Afrique du Sud. – Extrait du livre Tolkien, Créateur de la Terre du Milieu © Éditions Hoëbeke

Comme le futur Facteur, J.R.R. Tolkien fut orphelin de père, à l’âge de 4 ans [EDIT : sa mère décéda ensuite lorsqu’il avait 12 ans], tandis que Ferdinand Cheval se retrouva sans parents à 18 ans après le décès de son père, sa mère étant décédée lorsqu’il avait 11 ans. Si Cheval fut souvent contraint de lutter pour ne pas tomber dans la misère jusqu’à la trentaine, le futur écrivain vécut dans un milieu relativement privilégié, qui lui permit de se consacrer très tôt à son épanouissement personnel.

Le jeune étudiant J.R.R. Tolkien. - Extrait du livre Tolkien, Créateur de la Terre du Milieu © Éditions Hoëbeke
Le jeune étudiant J.R.R. Tolkien. – Extrait du livre Tolkien, Créateur de la Terre du Milieu © Éditions Hoëbeke

Autre point commun, malgré leurs divergences : Tolkien comme Cheval défient chacun à leur manière les conventions de leur classe sociale, mais aussi les représentations qu’on peut avoir de l’artiste marginal : ils avaient un métier à temps plein au service des autres, ils connurent le succès de leur vivant et s’investissaient dans la diffusion de leur œuvre (par des visites et cartes postales pour Cheval et des projets de couvertures pour Tolkien). Sans les relations qu’ils entretenaient, ils n’auraient pu par ailleurs obtenir le soutien d’un éditeur ou commercialiser l’image de l’œuvre.

Projet de couverture pour Le Hobbit peint et annoté par Tolkien. - Extrait du livre Tolkien, Créateur de la Terre du Milieu © Éditions Hoëbeke
Projet de couverture pour Le Hobbit peint et annoté par Tolkien. – Extrait du livre Tolkien, Créateur de la Terre du Milieu © Éditions Hoëbeke

La Terre du Milieu, de l’érudition à la popularité

Je n’évoquerai pas ici longuement l’impact du Hobbit, du Seigneur des Anneaux et de l’ensemble de la Terre du Milieu de Tolkien. On a déjà maintes fois raconté comment le jeune J.R.R. s’est passionné de récits poétiques et épiques dès son jeune âge, inventant des langues imaginaires dès l’adolescence avant de se passionner pour la linguistique et la philologie, jusqu’à devenir professeur à l’université d’Oxford. Comme cela a été raconté par Tolkien lui-même, c’est pour donner un contexte à ses premières langues elfiques qu’il imagina son monde imaginaire, dessinant ses cartes et écrivant ses histoires.

Arbres des langues imaginées par Tolkien. - Extrait du livre Tolkien, Créateur de la Terre du Milieu © Éditions Hoëbeke
Arbres généalogique des langues imaginées par Tolkien. – Extrait du livre Tolkien, Créateur de la Terre du Milieu © Éditions Hoëbeke

Son univers de “Faërie” naquit vraiment à l’aube de la Première Guerre Mondiale et dans les tranchées, sous la forme de grammaires puis de récits écrits pour lui et son cercle d’amis. Puis, c’est pour distraire ses enfants qu’il imagina Le Hobbit, qui rejoignit son “Legendarium” peuplé d’elfes, de nains, d’hommes et de magiciens. De simple conte, Le Hobbit rejoignit l’épopée au fil de l’écriture et son succès populaire inattendu l’obligea à entreprendre (dès 1937) une suite à la demande de son éditeur, Le Seigneur des Anneaux.

Page manuscrite par Tolkien d'un passage avec les Ents dans Les Deux Tours. - Extrait du livre Tolkien, Créateur de la Terre du Milieu © Éditions Hoëbeke
Page manuscrite par Tolkien d’un passage avec les Ents dans Les Deux Tours. – Extrait du livre Tolkien, Créateur de la Terre du Milieu © Éditions Hoëbeke

De ce rapide résumé, retenons que l’œuvre de Tolkien a acquis une grande popularité, d’abord comme conte avec Le Hobbit, puis comme épopée à l’occasion des rééditions du Seigneur des Anneaux dans les années 60 et après la sortie des films de Peter Jackson (2001-2003). Mais le cœur de l’œuvre se trouve dans les racines anglo-saxonnes (Beowulf que Tolkien traduisit, enseigna et analysa) et surtout antérieures (la culture scandinave de langue norroise). Autrement dit, la Terre du Milieu s’est développée à partir de récits anciens qu’une poignée d’intellectuels et enseignants comme Tolkien connaissait et pouvait à l’occasion, comme lui, lire dans le texte. Il a ainsi légué au monde la possibilité d’accéder à une culture érudite, à travers le prisme de son œuvre. Bien qu’il utilise des figures connues des lecteurs de son temps, Tolkien les représente d’une manière unique et inédite grâce à sa réappropriation de la culture passée.

Sigurd combattant le dragon Fafnir. - Extrait du livre Tolkien, Créateur de la Terre du Milieu © Éditions Hoëbeke
Sigurd combattant le dragon Fafnir. – Extrait du livre Tolkien, Créateur de la Terre du Milieu © Éditions Hoëbeke

Le Palais idéal, modelage d’un boulanger

La personne qui visite le Palais idéal du Facteur Cheval se retrouve quant à elle dans un territoire où tout est déjà connu (à la manière de Disneyland), mais assemblé d’une manière singulière, comme un imagier de pierre populaire, avec son chalet, sa mosquée, ses châteaux, ses animaux, ses figures mythologiques ou historiques maladroitement modelées. Modelées (plutôt que sculptées) par un homme dont le seul apprentissage du modelage fut dans sa jeunesse le pétrissage de la pâte à pain ou à gâteaux et sa seule expérience de construction celle des pièces montées !

Ferdinand Cheval bâtissait son palais à sa hauteur, avec ses techniques propres et notamment "pâtissières" - Extrait du livre Le Palais idéal du Facteur Cheval, Quand le songe devient la réalité © Éditions A.R.I.E.
Ferdinand Cheval bâtissait son palais à sa hauteur, avec ses techniques propres et notamment “pâtissières” – Extrait du livre Le Palais idéal du Facteur Cheval, Quand le songe devient la réalité © Éditions A.R.I.E.

Mais… Avant d’aller plus loin, il faut rappeler l’effet incroyable du Palais idéal : il faudrait, une fois dans sa vie, avoir vu ce que le Facteur Cheval a construit dans son jardin de Hauterives. Comment peut-on le décrire? Avec les mots de son créateur, c’est peut-être le mieux :

« L’imagination l’a peuplée de détails sans nombre jetés ça et là, un peu au hasard ; mais ce qui la rend curieuse, c’est son exécution patiente, obtenue sans le secours de la science des ingénieurs, des architectes et avec des matériaux sculptés par les eaux et durcis par le soleil ; c’est aussi l’enseignement qui en ressort et qui se traduit ainsi : “vouloir c’est pouvoir.”1»

Le Facteur Cheval rappelle avec flamboyance comment la volonté d’un individu peut permettre de s’élever au-delà de sa condition sociale, en dépit des moqueries. Des moqueries et des sarcasmes qui reposaient sur plusieurs idées préconçues :

  • celle qui suppose que tout individu qui se lance dans un projet hors du commun dans son jardin est sans doute un peu fou (encore plus s’il l’appelle un palais) ;
  • celle qui implique qu’un fils de paysan doit se consacrer à des travaux de fils de paysan et, au mieux, imiter les petits bourgeois ;
  • enfin, celle qui suggère qu’on ne peut avoir un esprit de poète ou d’artiste que si on a reçu la culture appropriée, ce qui n’était pas le cas de Ferdinand Cheval.
Ferdinand Cheval sculptant le sommet de la tour de Barbarie, sur son échafaudage très rudimentaire. - Extrait du livre Le Palais idéal du Facteur Cheval, Quand le songe devient la réalité © Éditions A.R.I.E.
Ferdinand Cheval sculptant le sommet de la tour de Barbarie, sur son échafaudage très rudimentaire. – Extrait du livre Le Palais idéal du Facteur Cheval, Quand le songe devient la réalité © Éditions A.R.I.E.

Ferdinand Cheval, enfant de l’école publique

« Mon instructions fut très élémentaire car elle n’était pas propagée comme aujourd’hui, et ce n’est qu’en grandissant que me vint l’amour du travail et de la lecture…2 », raconte Ferdinand Cheval, qui ne fut scolarisé que six années à l’école communale de Charmes. Dès 12 ou 13 ans, les garçons commençaient à conduire la charrue et abandonnaient l’école publique, à laquelle les pouvoirs publics de la monarchie de Louis-Philippe, puis de l’éphémère Seconde République et du Second Empire accordaient peu de moyens. En témoignent les conditions d’exercice des maîtres d’école d’Hauterives et de Saint-Vallier rapportées dans le livre Le Palais idéal du Facteur Cheval, Quand le songe devient la réalité.

Le livre Le Palais idéal du Facteur Cheval, Quand le songe devient la réalité contient aussi des pages très intéressantes (souvent édifiantes) sur les conditions d'enseignement dans la première moitié du XIXe siècle. © Éditions A.R.I.E.
Le livre Le Palais idéal du Facteur Cheval, Quand le songe devient la réalité contient aussi des pages très intéressantes (souvent édifiantes) sur les conditions d’enseignement dans la première moitié du XIXe siècle. © Éditions A.R.I.E.

En conséquence, le rapport aux mots est souvent problématique chez les personnes n’ayant pu bénéficier d’une scolarité poussée. Il y a en elles un mal-être linguistique qui est très sensible lorsqu’elles doivent s’exprimer à destination d’un public lettré, en particulier à l’écrit : « Je ne puis vous dire tous les détails les péripéties et la misère que j’ai endurée ce serait trop long à énumérer, mon instruction un peu restreinte ne me permettant pas de bien exprimer3 » déclare ainsi Ferdinand Cheval. Ses notes manuscrites montrent qu’il écrivait un français phonétique, qu’il faisait ensuite transcrire en français correct : « Toutan ga gnan ma vie j‘ai au cu pé ici mê mi nute de loizirs…4 » Quand on lit (sur le web ou ailleurs) que l’absence de maîtrise de l’orthographe est un signe d’imbécilité… Quant à la lecture, Mme Julia Achard en témoigne « Il regardait ses livres comme ça, mais je l’ai vu très peu lire5 », se souvenait celle qui accompagnait les visiteurs du Palais de 1907 et 1910. Sa culture était avant tout celle de l’instruction publique, des livres des colporteurs et, bien sûr, de l’expérience vécue.

Un colporteur. - Extrait du livre Le Palais idéal du Facteur Cheval, Quand le songe devient la réalité © Éditions A.R.I.E.
Un colporteur. – Extrait du livre Le Palais idéal du Facteur Cheval, Quand le songe devient la réalité © Éditions A.R.I.E.

Toutefois, Ferdinand Cheval possédait une qualité essentielle : la curiosité. De tous les envois que le Facteur distribuait, il en était un qui l’attirait et lui apporterait l’essentiel de son inspiration : Le Magasin pittoresque. Publié de 1833 à 1938, Le Magasin pittoresque était une encyclopédie populaire vendue par souscription, contenant à la fois des savoirs populaires à la manière des almanachs, un « magasin » contenant de la morale, de l’Histoire, de l’archéologie, de l’art, des sciences naturelles ou des récits de voyages. Ferdinand Cheval, lui, ne voyagea jamais.

A droite, une gravure tirée du Magasin Pittoresque, qui a pu inspirer le Facteur Cheval. - Extrait du livre Le Palais idéal du Facteur Cheval, Quand le songe devient la réalité © Éditions A.R.I.E.
A droite, une gravure tirée du Magasin pittoresque, qui a pu inspirer le Facteur Cheval. – Extrait du livre Le Palais idéal du Facteur Cheval, Quand le songe devient la réalité © Éditions A.R.I.E.

De ce savoir, le Facteur sculpteur et poète tira des images exotiques de palais hindous, de pagodes indochinoises, de casbah algériennes, mais aussi des souvenirs de fossiles, de sculptures et de mythes, et bien sûr un florilège de poèmes et de proverbes.

J.R.R. Tolkien et le Facteur Cheval, bâtisseurs de mondes condensés

Puisant son inspiration dans les formes naturelles et dans les pages du Magasin pittoresque, le Facteur Cheval sculpte la pierre et surtout malaxe la chaux pour créer son bestiaire fantastique, ses figures mythiques ou historiques et ses monuments miniatures. Le Palais idéal est la condensation en pierre du Magasin, une mémoire visuelle des connaissances sous la forme d’un monument, presque un palais de mémoire, accessible à toutes et tous. Mais on n’y trouvera pas les références attendues aux grandes œuvres de l’histoire de l’art, que Le Magasin pittoresque célébrait aussi : pas de Michel-Ange ici, mais des images de la nature, des évocations de figures et de civilisations à travers des représentations clairement nommées.

Palais et monuments du monde entier. - Extrait du livre Le Palais idéal du Facteur Cheval, Quand le songe devient la réalité © Éditions A.R.I.E.
Palais et monuments du monde entier. – Extrait du livre Le Palais idéal du Facteur Cheval, Quand le songe devient la réalité © Éditions A.R.I.E.

Toutefois, il est possible de voir dans le Palais l’inspiration plus érudite des architectures éphémères des fêtes de l’Ancien Régime, ainsi que celle des parcs aux grottes de rocailles (dès la seconde moitié du XVIe siècle en Italie, puis au XVIIIe). Contre le monopole de la bourgeoisie sur les productions culturelles, le Facteur Ferdinand Cheval propose sa propre exposition universelle des Merveilles du Monde, condensée en un monument unique et fascinant.

Quelques sculptures reproduites dans Le Magasin Pittoresque qui ont pu inspirer le Facteur Cheval. - Extrait du livre Le Palais idéal du Facteur Cheval, Quand le songe devient la réalité © Éditions A.R.I.E.
Page de droite, quelques sculptures reproduites dans Le Magasin Pittoresque qui ont pu inspirer les géants du Facteur Cheval. – Extrait du livre Le Palais idéal du Facteur Cheval, Quand le songe devient la réalité © Éditions A.R.I.E.

Cheval n’a pas le recul de Tolkien, il n’a pas son esprit d’intellectuel universitaire, il n’a pas passé en revue et décortiqué chacune des représentations qu’il a ajoutée à son Palais. Il s’approprie la culture en l’assemblant à sa guise et en modelant la chaux, mais il veut que ses visiteurs reconnaissent ce qu’il représente, au point qu’il ajoute des titres et des légendes pour lever les ambiguïtés. Tolkien, au contraire, donne aux lectrices et lecteurs l’impression de connaître les nains, les magiciens ou les elfes pour mieux dévoiler ce qui, dans son œuvre, les rend uniques, grâce à son usage de sources inconnues érudites. L’un et l’autre ont bénéficié de la diffusion des récits et des images grâce à l’impression de livres ou revues en masse, qui ont permis ensuite de diffuser leurs œuvres.

Vitrine de l'exposition "Fantaisies héroïques". © Culturellement Vôtre
Vitrine de l’exposition Fantaisies héroïques au Palais idéal du Facteur Cheval, avec des éditions originales des œuvres de Tolkien, mais aussi la réplique de l’Anneau Unique et des exemplaires du Magasin pittoresque. © Culturellement Vôtre

Dans la seconde partie de cet article, nous allons évoquer la puissance du rêve de Ferdinand Cheval et de J.R.R. Tolkien, aborder la notion de volonté et les conditions permettant aux rêves de se réaliser.

Seconde partie : Comment réaliser ses rêves

Notes

123 – Cité par Jean-Pierre Jouve, Claude Prévost et Clovis Prévost in Le Palais idéal du Facteur Cheval, Quand le songe devient la réalité, Étrépagny, A.R.I.E. Éditions, 2015 (première édition en 1981), pp. 296-298.

45 – Ibid, p. 271 et p. 253.

Retrouvez tous nos articles sur l’écrivain de fantasy J.R.R. Tolkien (critiques de livres, de films, jeux vidéos…) dans notre dossier.

Article écrit par

Jérémy Zucchi est auteur et réalisateur. Il publie des articles et essais (voir sur son site web), sur le cinéma et les arts visuels. Il s'intéresse aux représentations, ainsi qu'à la science-fiction, en particulier aux œuvres de Philip K. Dick et à leur influence au cinéma. Il a participé à des tables rondes à Rennes et Caen, à une journée d’étude sur le son à l’ENS Louis Lumière (Paris), à un séminaire Addiction et créativité à l’hôpital Tarnier (Paris) et fait des conférences (théâtre de Vénissieux). Il a contribué à Psychiatrie et Neurosciences (revue) et à Décentrement et images de la culture (dir. Sylvie Camet, L’Harmattan). Contact : jeremy.zucchi [@] culturellementvotre.fr

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