Une soixantième valeur sûre
Depuis 1994, elles font le bonheur des enfants avec une constance assez folle. Qui ça ? Les Drôles de petites bêtes, ces albums jeunesse créés par le très prolifique (et secret) Antoon Krings. Le concept est redoutable : raconter un morceau de vie d’un animal (en très grande majorité des insectes de jardin), avec en prime une petite leçon de vie jamais lourdingue. Aussi bien à l’écriture qu’aux dessins, celui qui est considéré comme le « J.K. Rowling des moins de 6 ans » a créé un univers plein d’une personnalité si marquante que ces Drôles de petites bêtes sont aujourd’hui l’objet d’un certain culte, ces petit personnages devenus autant de peluches, CD audio, série animée et même jeu de société. Le 1er mai 2016 est sortie la dernière itération de cette franchise pour le moins importante : Léo le Lérot.
Voici le récit que nous propose ce soixantième volume des Drôles de petites bêtes. Léo le Lérot dort le jour et ne sort qu’à la tombée de la nuit pour se nourrir. Tout le contraire du radin Benjamin le Lutin qui, lui, se réserve tous les fruits du jardin et se goinfre toute la journée ! Or c’est bientôt l’hiver, et le pauvre Léo n’a plus rien à manger à cause de l’avarice de ce satané lutin. Il a beau frapper à toutes les portes, personne ne lui vient en aide. Il ne lui reste plus qu’à se lancer dans une petite « visite » à Benjamin à la nuit tombée, pour lui dérober toutes ses compotes et ses confitures. Et c’est bien fait pour le lutin : il n’avait qu’à partager avec ses copains du jardin !
On retrouve, dans Léo le Lérot, toutes les qualités des travaux signés Antoon Krings. Tout d’abord, ce qui marque certainement le plus, ce sont ces dessins magiques qui habillent les pages. Comme c’est beau, plein de personnalité ! On sent, dans le coup de pinceau de l’auteur, un véritable amour pour ses sujets, une envie de capter ces animaux anthropomorphes dans un mouvement constant, une situation assez imagée pour accompagner la qualité de ces peintures d’un aspect indéniablement mignon. Le grand succès de ces Drôles de petites bêtes n’a rien d’étonnant : ces animaux sont très gâtés par la passion débordante d’Antoon Krings, et ça se ressent à chaque instant.
Léo le Lérot, c’est bien entendu une histoire, et celle-ci est fidèle au concept des Drôles de petites bêtes. Antoon Krings imagine le quotidien de ce petit cousin du loir, animal discret, habile… et nocturne. C’est tout naturellement que Léo est donc décrit comme un petit chapardeur de nuit qui, pour se nourrir, va devoir se confronter à la radinerie de Benjamin le Lutin. L’enfant va s’attacher à la personnalité de cette si charmante bestiole, et l’histoire lui réserve une problématique intéressante, qui met en avant l’importance du partage. Léo le Lérot sensibilise aussi aux saisons, en rappelant subtilement que certains animaux hibernent, et doivent se nourrir pour passer l’hiver dans de bonnes conditions. Antoon Krings est motivé par l’envie de présenter ses bêtes avec une exactitude factuelle qu’il réussit à envelopper d’une couche narrative étudiée pour capter l’attention jusqu’au terme.
Léo le Lérot rejoint, donc, la longue lignée de ces Drôles de petites bêtes qui font le bonheur des enfants depuis des années. D’une qualité constante, ces ouvrages jeunesses sont décidément une valeur sûre du genre. C’est sacrément beau, l’univers est fait pour accrocher l’imaginaire des enfants, et le récit est aussi simple que distrayant. Léo le Lérot est le dernier-né d’une licence qui se doit de figurer dans toute bibliothèque jeunesse qui se respecte.
Léo le Lérot, par Antoon Krings. Aux éditions Gallimard Jeunesse, collection Giboulées, 28 pages, 6.20 euros. De 3 à 6 ans. Sortie le 1er mai 2016.