Caractéristiques
- Auteur : Hans Christian Andersen (texte) & Charlotte Gastaut (illustrations)
- Editeur : Flammarion Jeunesse
- Collection : Castor Poche
- Date de sortie en librairies : 17 octobre 2016
- Nombre de pages : 96 pages
- Prix : 5,60 euros
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- Note : 8/10 par 1 critique
Le film des studios Disney, sorti il y a maintenant 3 ans, a remis au goût du jour ce conte publié en 1844 par Hans Christian Andersen, le plus célèbre auteur danois. A tel point que l’on en oublierait presque que le texte original était fort différent de sa très libre adaptation animée, malgré quelques thèmes communs.
Redécouvrir le conte original après le dessin animé
La réédition en format poche par Flammarion Jeunesse de ce classique de la littérature, sera ainsi l’occasion idéale de faire découvrir aux enfants une version différente mais non moins passionnante de cette histoire qu’ils ont tant appréciée au cinéma. Ainsi, si le dessin animé de Disney mettait en scène deux sœurs aux personnalités diamétralement opposées, dont l’une est en apparence froide comme la glace, le conte d’Andersen suit les aventures d’un frère et d’une sœur, confrontés à la mystérieuse et dangereuse Reine des Neiges. Le petit garçon, Kay, a reçu une poussière provenant d’un miroir maléfique dans l’œil, faisant pénétrer le Mal en lui : il devient insensible et voit de la laideur là où autrefois il n’y avait que beauté. Multipliant les bêtises, il suit un jour le traîneau blanc d’une femme qui n’est autre que la fameuse Reine, qui fait tomber la neige sur le pays durant l’hiver. Elle kidnappe le petit garçon, l’emporte dans son château de glace, l’embrasse et le gèle presque entièrement. Sa sœur, Gerda, part alors à sa recherche…
Comme nous le voyons à la lecture de ce bref résumé, le conte original, tout en s’intéressant en partie aux mêmes thèmes que le dessin animé, donne une vision fort différente du personnage de la Reine des Neiges, qui est la « méchante » de l’histoire, tandis que le petit Kay pourrait être vu comme une vision masculine et sans pouvoirs du personnage d’Elsa. Comme tous les contes, La Reine des Neiges se présente comme une parabole et possède une dimension morale : il montre comment le comportement des enfants, notamment celui des petits garçons, peut changer lorsqu’ils commencent à grandir et qu’ils veulent se rebeller en devenant en apparence insensibles et turbulents. La poussière microscopique qui rentre dans son œil est ainsi le symbole de ce qui nous pousse, adultes, à voir les choses en noir et à nous tourner les uns contre les autres, tandis que son enlèvement par la Reine des Neiges, qui lui ôte la mémoire et gèle son cœur, représente cette distanciation, à la fois vis-à-vis de ses proches, mais aussi de ses propres émotions. Un sort qui ne pourra être rompu que par la force de l’amour qui l’unit à sa sœur, et qui finira par le délivrer.
Une morale positive au service d’un récit merveilleux et inquiétant à la fois
Au-delà du strict point de vue de l’intrigue, La Reine des Neiges s’inspire en partie de la mythologie nordique et reprend des éléments et motifs typiques des contes tels que le miroir magique maléfique, dont la description est si puissante qu’on en retrouvera l’influence dans bien des œuvres ultérieures, qu’elles soient littéraires, cinématographiques ou télévisées. Ainsi, pour prendre deux exemples récents et grand public, la série télé Once Upon a Time et le blockbuster Le Chasseur et la Reine des Glaces ont tous deux repris ce thème du miroir magique ayant pour effet de faire voir le mal en toutes choses chez les personnes en étant victimes, en faisant ressortir leurs peurs enfouies ou en accentuant leurs mauvais côtés. Dans ce dernier film, d’autres éléments du conte d’Andersen étaient repris, comme le château de glace de la Reine des Neiges et l’idée que celle-ci se constitue une armée (de flocons de neige dans le conte, d’enfants kidnappés dans le film).
Le déroulement de l’intrigue est typique de la structure des contes, à la différence près que le texte d’Andersen est relativement plus long que ceux retranscrits par les frères Grimm ou Charles Perrault au XVIIIe siècle. Comme souvent chez le conteur danois, époque oblige, la symbolique religieuse tient une place non négligeable, bien que celle-ci soit avant tout symbolique. En premier lieu, bien que l’auteur n’était lui-même pas très religieux, on peut voir dans les prières de Gerda une forme de protection face aux forces du paganisme incarnés par la Reine des Neiges. Ensuite, ces références, notamment lorsque la morale de l’histoire est dévoilée dans la conclusion, sont utilisées pour véhiculer un message positif auprès des enfants que l’on pourrait résumer ainsi : la bonté de cœur, propre à l’enfance, permet aux hommes d’accéder à une forme d’éternité. Evidemment, en langage religieux, cela se traduit par être accepté au paradis et « rejoindre l’enfant Jésus », mais, de manière plus générale, l’idée est que la bonté de cœur, l’amour que nous portons à nos proches, nous permet de demeurer « enfants » au fond de nous et de venir à bout du mal que sont l’insensibilité ou la méchanceté.
La Reine des Neiges demeure donc, plus de 170 ans après sa création, un conte intemporel et positif pour les enfants, porté par la narration incomparable de Hans Christian Andersen, qui fait pénétrer les lecteurs dans un univers merveilleux et effrayant à la fois, tout de neige, de glace et d’élans et animaux amicaux. Cette réédition en format poche bénéficie également des belles illustrations de Charlotte Gastaut, dans lesquelles on sent, entre autres, l’influence de la peinture asiatique.