Les Contes de la Crypte version cocorico
Vous ne le connaissez peut-être pas, et pourtant il a le potentiel pour contenter bien des amateurs d’anthologies horrifiques. Ses œuvres sont dans la veine, si appréciée, des fameux Contes de la Crypte : Oncle Mordreed revient d’entre les morts pour nous hanter encore et encore. En effet, le putride maître de cérémonie sévissant dans la série Beyond The Tomb, dont le premier numéro est paru en 2011, revient cette fois-ci chez l’éditeur Wetta (Vreckless Vrestlers, Aliens la série originale : 30ème anniversaire), et toujours avec l’excellent Thierry Olivier aux commandes. Un retour intitulé Affreusement Vôtre (Culturellement Vôtre ne pouvait qu’être intéressé !), mais fait-il sens ?
Affreusement Vôtre est donc une anthologie d’histoires ultra marquées par la culture dite « de genre ». La structure, initiée par Tonton Mordreed en personne (bon, sans doute un peu aidé par l’auteur de l’album), est assez symptomatique : on sent que Thierry Olivier déborde de passion pour l’épouvante, mais aussi pour l’histoire de ce genre si particulier. Ainsi, il n’hésite pas à retracer, entre deux récits récits, l’histoire d’une figure mythique des monstres classiques : Frankenstein et Dracula en l’occurrence. Aussi informatives que bien mis en scène, ces historiques ne prendront pas par surprise les spécialistes de ces personnages mais ont le mérite de signifier qu’avec Affreusement Vôtre on est entre fins connaisseurs.
Certes, Oncle Mordreed prend soin de notre culture générale, mais il aime aussi nous raconter des histoires horrifiques dans la plus pure tradition d’EC Comics. Affreusement Vôtre s’empare de figures classiques et nous donne à découvrir des histoires plutôt simples mais charmantes à souhait. Du moins, pour qui aime le bis, le Z qui tache, les zomblards putrides etc. Les autres, les papes du bon goût, sont aussi invités à table mais qu’ils prennent note sans trop la ramener. En parlant de morts-vivants, « Zombi Story » est la première histoire, et prend place évidemment après l’apocalypse qui nous pend au pif. Transformées en bouffeur de cerveaux, cet organe qu’ils ne possédaient plus de leur vivant, ces âmes en peine seront à l’origine d’une bien étrange histoire d’amour entre deux survivants. « L’Encaisseur » met en scène un huissier de l’Enfer. Oui, encore pire que les vrais, c’est possible (mais pas humainement). Sa mission, rappeler sa dette à un tueur en série bien énervé, et les intérêts sont du genre colossaux. Notre récit préféré, sans aucun doute.
Une anthologie qu’on aimerait voir revenir pour plusieurs suites
Affreusement Vôtre tente même une incursion dans la science-fiction avec « Dorgan le Proscrit », qui raconte comment un homme de l’espace s’est retrouvé condamné à l’exil forcé. Une histoire qui, même si elle délivre une finalité pour le moins hilarante, demande obligatoirement une suite. Enfin, « Coup de Sang » s’intéresse aux vampires et au destin particulièrement mouvementé de l’un d’eux qui, de fil en aiguille, va se retrouver salutaire de deux enfants pas aussi innocents qu’ils en ont l’air. Le lecteur a donc droit à six histoires, quatre récits et deux historiques, de quoi passer un bon moment dans une ambiance à la fois légère et grinçante. Aucune véritable fausse note dans les histoires, même si « Dorgan le Proscrit » se doit de dévoiler un peu plus son univers dans une suite (un album dédié, soyons fous !).
Aussi bien au travail sur les scénarios que sur les illustrations (en noir et blanc), Thierry Olivier rend là un travail gouleyant à plus d’un titre. Visuellement c’est plein d’énergie et clairement on sent une patte pulp totalement assumée, aimée par l’auteur. On le sent particulièrement dans le design de l’Oncle Mordreed, délicieusement répugnant, véritable mascotte d’un Affreusement Vôtre que l’on espère voir se décliner sur plusieurs autres numéro : le potentiel est là.
Affreusement Vôtre, une bande dessinée scénarisée et illustrée par Thierry Olivier. Aux éditions Wetta, 64 pages, 15.95 euros. Sortie le 27 mai 2016.