Caractéristiques
- Auteur : Jim Zub (scénario) & Steve Cummings (dessin)
- Editeur : Glénat
- Collection : Glénat Comics
- Date de sortie en librairies : 8 mars 2017
- Format numérique disponible : Non
- Nombre de pages : 160
- Prix : 14,95€
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- Note : 6/10 par 1 critique
Un récit initiatique « à la Buffy » au Japon
Lancé par Image Comics en 2014, Wayward débarque en France chez Glénat dans une belle édition de 160 pages enrichie d’annexes détaillant les références à la culture nippone et aux fameux yōkai, ces créatures surnaturelles, mi-fantômes, mi-démons, propres au folklore japonais. L’histoire est celle de Rori Lane, une adolescente irlandaise par son père et japonaise par sa mère, qui décide de rejoindre celle-ci à Tokyo pour y poursuivre sa scolarité. Rori a beau parler couramment japonais, elle n’a jamais mis les pieds au Pays du Soleil Levant, et elle se retrouve comme qui dirait lost in translation, perdue entre son jet-lag, le labyrinthe des transports en commun et des rues, mais aussi les codes de cette culture qu’elle pensait connaître. Ainsi, à peine arrivée au lycée, on lui fait comprendre que son niveau n’est pas suffisant et qu’elle va devoir teindre ses cheveux naturellement roux en noir et les laisser pousser si elle ne veut pas passer pour une « fauteuse de trouble ». Lorsqu’en rentrant chez elle un soir elle est attaquée par des monstres et secourue par une jeune fille aux étranges pouvoirs suivie par des chats, sa vie prend une tournure résolument originale. Et encore plus quand elle se rend compte qu’elle possède aussi d’étranges capacités…
Comme on peut le percevoir à la lecture de ces quelques lignes, Wayward n’est pas sans rappeler Wraithborn de Joe Benitez et Marcia Chen par son intrigue, puisqu’il s’inscrit dans la droite lignée d’un récit initiatique à la Buffy (en plus léger), avec de nombreux passages nocturnes. D’ailleurs, Rori se retrouve bien vite entourée d’une petite bande de gosses marginaux aux pouvoirs bien spécifiques, ce qui ne fait qu’accentuer le parallèle avec le Scooby Gang. L’originalité de la série se situe dans le rapport de l’héroïne au Japon, qu’elle découvre et dans lequel elle tente de trouver ses marques. A son arrivée, pour ne pas « perdre le fil », elle se répète sans cesse qu’il lui suffit de « relier les points entre eux » et, miraculeusement, elle retrouve son chemin. Ce perpétuel vacillement des repères spatiaux-temporels, la période d’adaptation par laquelle doit passer Rori se fait assez vite très métaphorique puisqu’elle se met à percevoir de manière très littérale d’immenses fils de lumière rouges et bleus qui la guident à travers le dédale des rues tokyoïtes et la mènent droit vers des monstres qui veulent lui faire la peau. Vient alors la découverte des pouvoirs, sur laquelle le scénario de Jim Zub s’appesantit assez peu au final.
Une introduction menée tambours battants
Si l’on sent que la nature du pouvoir de Rori et des autres enfants sera davantage explorée dans la suite de la série, ce parti pris pourra s’avérer déroutant : malgré sa surprise et sa perplexité, l’adolescente ne semble pas se demander d’où lui viennent ces étonnantes visions, ni sa surprenante capacité à botter les fesses des monstres ou à inscrire des idéogrammes magiques sur le front de ces derniers. Le récit avance tambours battants et l’équipe se constitue autour de l’héroïne, qui ne prend pas vraiment le temps de se poser la moindre question au milieu de tout ce tumulte. Cependant, on sent que Jim Zub avance des pions qu’il reprendra par la suite : ainsi, la mère de Rori semble jouer un rôle déterminant, et la dernière partie du comics suggère que l’on apprendra plus sur son activité et ses patrons dans le tome 2.
Il faut donc accepter de prendre son mal en patience et de ne pas tout comprendre dans cette introduction punchy, qui ne s’attarde peut-être pas suffisamment sur la dimension réaliste et quotidienne de Tokyo, traitée de manière intéressante, mais qui se trouve un peu trop vite éclipsée par les combats de monstres. Visuellement, le style de Steve Cummings, rompu aux comics de super-héros (Green Lantern, Elektra, Batman: Legends of the Dark Knight…), est clair et agréable, sans être nécessairement révolutionnaire. Les personnages sont plutôt expressifs et l’univers visuel se situe entre le comics ado traditionnel et un trait légèrement manga. Le découpage évolue en fonction de l’action, mais reste relativement simple, avec une prédominance de grandes cases avec peu de texte, et des dessins en pleine page en fin de chapitre. La colorisation se révèle également convaincante, avec des teintes tantôt pastel, tantôt plus franches. Les différentes ambiances font que l’on ne l’on ne s’offusque pas trop des différences de teintes, réalisées par pas moins de 6 artistes différents : Rori passe d’un monde à l’autre , nous pouvons donc accepter cette hétérogénéité. Par ailleurs, la transition d’une atmosphère à l’autre n’est pas trop choquante.
Wayward tome 1 : Un nouveau départ, sans être une complète réussite, se révèle donc une introduction plaisante, qui se lit rapidement et donne envie de voir de quoi il retourne au juste par la suite. Si la nature des démons qu’affronte Rori et ses amis mérite d’être davantage peaufinée, ainsi que son rapport à ces surprenants pouvoirs tombés du ciel, la manière dont Jim Zub montre son héroïne s’adapter à son nouvel environnement permet de distinguer le comics des nombreuses séries du même acabit jouant sur la métaphore du passage à l’âge adulte. On espère alors que les auteurs sauront développer et densifier cet univers adolescent plutôt attachant au demeurant.