Après deux premiers volumes déjantés qui plantaient l’univers de la série, Deathco est de retour chez Casterman avec un tome 3 mené tambours battants, qui bifurque dans sa dernière partie pour aboutir à un cliffhanger qui promet un tome 4 rempli de suspense et résolument sanglant.
Un manga sans temps mort, apportant son lot de révélations
Tout en se plaçant narrativement dans la continuité de ce qui a précédé, cette suite diffère par plusieurs apects de ce qu’Atsushi Kaneko avait pu établir jusque-là. Pour commencer, le dialogue est quasi-absent de la première moitié du volume, resserrant encore davantage, si cela était possible, les planches autour de l’action. En mauvaise posture après s’être heurtée aux tueurs qui cherchent à décimer les Reapers, la redoutable et quasi-indestructible Deathko est faite prisonnière et l’on menace de la torturer pour lui faire révéler les secrets de la Guilde, l’organisation qui envoie leur mission aux tueurs à gages afin de liquider des cibles précises. Bien entendu, cette situation ne durera guère et elle parviendra à tourner les choses à son avantage. Le reste du manga, dans le ton second degré qui caractérise la série, nous en apprendra davantage sur les relations de cette étrange gamine complètement autiste et Madame M, sa bienfaitrice, sur laquelle on sait très peu de choses.
Si le mangaka entretient encore et toujours le mystère sur son héroïne, son histoire et celle de la Guilde, il abat méthodiquement ses cartes et nous donne malgré tout l’impression d’avancer et de savoir où il va, alors même que Deathco aurait facilement pu s’enliser dans la seule accumulation de contrats remplis de manière expéditive par l’adolescente gothique. Si l’on ignore encore toute l’histoire de Madame M et les raisons profondes qui la poussent à agir, nous apprendrons néanmoins pourquoi elle veille sur Deathko, dont elle seule connaît la véritable identité. L’histoire personnelle de cette dernière, qui apparaît toujours complètement dépersonnalisée, broyant du noir en semblant se fondre dans une sorte de dépression cataclysmique, comme si elle portait tout le poids du monde sans raison aucune, ne sera pas davantage révélée. Mais en faisant quelques révélations prépondérantes, Atsushi Kaneko créé un suspense certain.
Une suite qui s’annonce… apocalyptique
Deathco tome 3 se lit très vite (30 mn tout au plus) et emprunte un chemin narratif différent dans sa dernière partie, donc, où l’accent n’est pas tant mis sur la cible en elle-même que sur ses agissements, dont on sent, pour la première fois, qu’ils pourraient mener à une véritable catastrophe tandis que le sort des précédentes cibles de la Reaper était plus ou moins réglé d’avance. Et, bien entendu, la catastrophe tant redoutée finira bel et bien par se produire, laissant deviner une suite apocalyptique, où les tueurs à gages de la Guilde ne seront plus le premier soucis des crapules en tous genres peuplant ce monde dystopique dont la violence grand guignolesque, tout en clair-obscur, lorgne ouvertement du côté des comics à la Frank Miller, Batman ou The Crow.
Graphiquement, ce troisième tome est toujours très efficace, avec un découpage ultra-dynamique et sans temps mort. On constatera d’ailleurs que l’accent est davantage mis sur les personnages et moins sur les décors, qui nous étaient présentés avec un grand soucis du détail dans les précédents volume, notamment le premier. Puisque nous connaissons à présent les personnages et les principaux lieux de l’action, l’ambiance néo-noir un peu mystérieuse et flottante cède la place à un déchaînement de violence qui, s’il était déjà présent dans les tomes 1 et 2, est ici bien plus poussé par l’enchaînement de ces passages.
Les bastons et exécutions ne sont pas les plus gores de la série, qui s’est déjà montrée plus vicieuse, mais nous avons clairement l’impression de nous trouver au sein d’un volume de transition, enchaînant les rebondissements pour mieux nous surprendre dans sa conclusion. Encore une fois, Atsushi Kaneko livre un manga très cinématographique, et, si l’on pourra peut-être regretter que l’ambiance soit moins travaillée, l’auteur parvient à capter l’attention du lecteur en donnant un tour pour le moins intrigant à sa série, dont on sent qu’elle pourrait clairement partir dans n’importe quelle direction, ce qui ne peut qu’attiser notre curiosité pour la suite.
Deathco tome 3 d’Atsushi Kaneko, Casterman, sortie le 25 mai 2016, 200 pages.8,45€.