Un diptyque original pour David Gemell
Son nom est sur toutes les lèvres des amateurs de fantasy, d’autant plus depuis qu’il nous a tristement quitté en 2006, David Gemmell est l’un des auteurs ayant construits l’une des plus belles carrières du genre ces dernières années. Grâce à son style que l’on qualifiera de rustique, et ses intrigues qui n’ont cessé de se bonifier (malgré quelques redites, admettons-le), l’écrivain laisse derrière lui bien des œuvres de qualité. En cette fin d’année, et comme à son habitude, Bragelonne profite des festivités pour sortir quelques intégrales (Les pirates de l’Escroc-Griffe, L’empire brisé, Odyssées), et celle de La reine faucon est l’une des plus intéressantes.
La reine faucon : l’intégrale réuni bien évidemment les deux tomes dans une seule (et bien belle) édition. Le premier roman s’intitule Reine des batailles, et comme tout premier tome il a comme tâche d’installer un univers, les personnages qui le peuplent et les problématiques qui créeront le récit. Qui connaît un minimum l’œuvre de David Gemell sait à peu près à quoi s’attendre, encore que nous verrons que quelques surprises sont distillées ici ou là. L’histoire se concentre sur Sigarni, jeune femme appartenant au clan des Highlanders, peuplade dominée par le cruel Baron Gottasson. Descendante directe de la lignée royale des higlanders, elle représente leur seul espoir d’un futur plus apaisé. Par contre, son cheminement n’est pas de tout repos (il est même traumatisant sur un bien malheureux événement), et David Gemell nous surprend de par les épreuves qu’il fait subir à son héroïne. Sans doute dû à cette première dans la carrière de l’auteur (il n’avait jamais eu d’héroïne auparavant), cette façon de la mettre en valeur par sa motivation et sa force nous ravit. Son évolution est d’ailleurs très bien maîtrisée, et la jeune femme fera bientôt place à une véritable meneuse. Comme souvent avec l’auteur, l’histoire possède un véritable écho, et ici le rapport de l’Angleterre avec l’Écosse est clairement évoqué en sous-texte. Signalons ici que Reine des batailles propose un final en forme de point final, et la suite en reprend seulement l’univers et la situation géopolitique.
Un sous-texte qui s’inscrit dans le réel
La reine faucon : l’intégrale se poursuit avec Le faucon éternel, et comme on l’a signifié il s’agit d’une suite placée dans le même univers mais pas vraiment dans la continuité du précédent tome. Alors que les highlanders profitent de leur liberté durement acquise, les Aenirs continuent de semer une violente désolation dans les villages du Sud des montagnes. On s’intéresse plus particulièrement à Caswallon, guerrier et voleur de son état : un Farlaine pour être plus précis, et il pressent le danger à venir. Alors que le premier tome était tout ce qu’il y a de plus agréable à suivre, Le faucon éternel a eu tendance à nous perdre à grands coups de voyages dimensionnels. L’intrigue en elle-même est un peu moins percutante, tout comme les combats et les personnages d’ailleurs, mais surtout c’est cette confusion dans les différents « arbres de possibilité » qui ont joué un vilain tour à la cohésion de l’ensemble. Moins mémorable donc, mais le retour de Sigarni vaut à lui seul que l’on s’accroche parfois, et ce même si cela peut s’embrouiller dans les esprits.
La reine faucon : l’intégrale est, donc, un voyage au moins à moitié marquant. Si Le faucon éternel nous a paru moins cadré, peut-être trop exigeant envers sa propre structure, Reine des batailles est d’un intérêt autrement plus prononcé : originalité dans le personnage principal, récit qui avance sans anicroches, personnages secondaires qui évoluent eux aussi et morts percutantes, on a là un programme tout à fait recommandable. Et, si vous êtes du genre fans des problématiques typiques des rapports historiques pour le moins compliqués entre l’Angleterre et l’Écosse, vous en serez encore plus conquis.
La reine faucon : l’intégrale, un roman écrit par David Gemmell. Aux éditions Bragelonne, 593 pages, 25 euros. Sortie le 30 novembre 2016.