Caractéristiques
- Auteur : Gilbert Hernandez
- Editeur : Delcourt
- Collection : Erotix
- Date de sortie en librairies : 17 mai 2017
- Format numérique disponible : Non
- Nombre de pages : 96
- Prix : 12,50€
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- Note : 3/10 par 1 critique
Le sexe comme Créateur
Avant toute chose, sachez que Jardin d’Eden est une œuvre pornographique, et si notre critique ne contient aucune image choquante, sachez que la lecture n’est pas du tout pour tous publics. Vous êtes prévenus. Ce préambule effectué, on peut aborder cet ouvrage qui, clairement, sent le souffre à des kilomètres. Une couverture qui en dit long, surtout quand elle est habillée d’un titre aussi frontal, et effectivement un contenu pour le moins osé…
Jardin d’Eden n’est pas tant motivé par une envie de narration, que par celle de régler des comptes avec les Créationnistes. Bref, c’est la religion catholique qui est attaquée, on peut même écrire qu’elle subie une saillie pour le moins violente dans l’esprit. L’auteur, Gilbert Hernandez, pourra essayer de s’en défendre, prétextant que son brûlot n’est, au fond, qu’une preuve d’amour. Que seul le sexe est derrière la vie, et non une quelconque divinité. Bien entendu, il appartient au lecteur de le rejoindre, ou pas, l’artiste ne semble pas dans une position didactique (contrairement à certains religieux extrémistes, soit écrit en passant). Mais, sachez que l’imagerie développée a de quoi surprendre, choquer, et surtout créer une certaine aversion.
Une charge qui manque cruellement de finesse
Jardin d’Eden retrace, en version très grosso-modo, une partie de la Bible, plus précisément la Genèse. Adam vient au monde, puis est créée Eve, et ainsi de suite jusqu’à la fin de la longue traversée de Noé. Cela, c’est la base biblique. Gilbert Hernandez s’empare de ce socle, et la détourne pour la mener vers sa vision des choses. Son but, qui est de sexualiser l’évolution de l’humanité, manque clairement de profondeur. On le notera dès la « naissance » d’Adam, qui démontre bien la complexité du principe d’œuf et de la poule. Si l’Homme est né du sexe, alors quelle était la nature de celui qui a donné cet être ? Darwin est certainement la réponse de l’auteur, mais il ne l’explicite pas, trop englué dans une envie d’en découdre avec les Créationnistes. Ce n’est pas un point de vue, mais un clash.
Mais est-il de qualité, ce clash ? Pas vraiment. Tout d’abord, la violence des représentations jouent contre le message le l’auteur. Jardin d’Eden pourra dégoûter le lecteur, pas vraiment rassuré par une sexualité carrément dégoulinante. eut-être sera-ce différents pour certains autres, les goûts et les couleurs ne se discutent que modérément. Le fond, lui, est plutôt symptomatique d’un athéisme très dur, typiquement américaine car fondé sur une autre violence : celle d’une religion qui a sans doute exagéré le trait pendant une trop longue période. Gilbert Hernandez blasphème, vulgarise, détruit méthodiquement, mais il lui manque ce qu’il reproche au camp d’en face : un manque cruel de réplique constructive. On ne voit pas, au final, où nous emmène sa vision du monde. Quant aux dessins, on retrouve la patte de l’auteur, qui donne dans la naïveté poussée à l’extrême. Dommage qu’une partie des cases se ressemblent bien trop, créant une certaine lassitude alors même que l’ouvrage est court. Au final, Jardin d’Eden frappe à côté de sa cible, à trop vouloir se la farcir.