Caractéristiques
- Auteur : Cosey
- Editeur : Glénat
- Collection : Glénat Disney
- Date de sortie en librairies : 2 mars 2016
- Format numérique disponible : Non
- Nombre de pages : 48
- Prix : 17€
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- Note : 8/10 par 1 critique
Nous vous en parlions récemment, les éditions Glénat ont inauguré cette année une nouvelle série de bandes dessinées présentant des aventures inédites de Mickey et ses amis, conçues par des auteurs francophones. L’occasion de rendre hommage à l’univers créé par Walt Disney à la fin des années 20 et de revisiter l’histoire des personnages. Deux albums, Mickey’s Craziest Adventures et Une mystérieuse mélodie, sont donc parus le 2 mars 2016 et deux BD supplémentaires, avec respectivement Loisel et Tebo au dessin, paraîtront en octobre prochain.
Quand Mickey rencontre Minnie
Après avoir découvert l’excellent Mickey’s Craziest Adventures, nous avons donc plongé dans Une mystérieuse mélodie de Cosey. L’auteur de Jonathan effectue un retour aux origines avec cette jolie histoire située en 1927, soit un an avant l’apparition de Mickey dans le court-métrage Plane Crazy. Et ce n’est rien de moins que la rencontre entre Mickey et sa fiancée Minnie que le Suisse nous propose de découvrir ! Cette zone d’ombre, qui ne fut jamais éclaircie par Disney puisque dès le départ la célèbre souris est accompagnée de la coquette Minnie, est ainsi le prétexte à une intrigue riche en références, drôle et faisant là encore appel à l’imagination du lecteur.
La rencontre des deux souris, dans le compartiment d’un train plongé dans l’obscurité, est ainsi une merveille de suspense et de suggestion. Retardant le moment où les deux personnages se feront véritablement face, Cosey joue sur la proximité de Mickey et Minnie tout en respectant le cahier des charges Disney et la « châsteté » des héros. La future fiancée de la petite souris, dont on ne voit que les mains, les jambes, le bas de la robe fleurie et les escarpins, endormie à la place de Mickey, finira par s’appuyer sur son épaule, s’affalant de plus en plus sur lui et le chatouillant avec ses oreilles sans que l’on puisse voir quoi que ce soit, au final. L’auteur, sans être dans la transgression, fait ainsi preuve de malice et l’énigme que constitue leur rencontre (lorsque le jour se lève, elle a disparu avec un manuscrit inédit que Mickey transportait) est la source d’un suspense savamment entretenu.
Un album vintage et moderne à la fois
Très différent de la dimension résolument loufoque de Mickey’s Craziest Adventures, dont le rythme était par ailleurs volontairement soutenu, Une mystérieuse mélodie tourne autour d’un récit romantique davantage centré sur l’histoire des personnages et leur caractère, facilement reconnaissable. Pas de méchants, de trésor ou de monde enchanté ici, simplement la Californie des années 20, son charme old fashioned et un Mickey scénariste pour des films rappelant les courts-métrages Silly Symphonies produits dès 1929 par les studios Disney. Plusieurs références visuelles sont ainsi distillées au fil des pages, comme les fleurs jaunes du court-métrage de 1932, Des fleurs et des arbres, le tout premier en couleur et on apprendra également pourquoi le chien de Mickey porte le nom de Pluto, un nom qui signifie Pluton en anglais.
Une grande partie des personnages entourant habituellement Mickey sont présents, ne serait-ce qu’au travers d’une case ou d’un court passage : Pluto donc, mais aussi Dingo, Donald, Horace, Annabelle, Pat Hibulaire… Cosey s’amuse également à citer Shakespeare, Dante et met la mascotte des enfants face à un défi de taille : le Big Boss du studio lui demande d’écrire un véritable drame romantique ! Mickey, héros naïf, éternel optimiste, doit donc écrire à propos de quelque chose dont il ignore tout. Jouant ainsi avec la caractérisation des personnages, l’auteur tisse un récit d’une belle finesse sous ses dehors classiques, fait référence à l’histoire des studios Disney (on trouvera par exemple une courte apparition d’Oswald le lapin chanceux) ou encore à l’apparition du parlant au cinéma.
Le tout est réalisé dans un style vintage du meilleur effet, du format carré de l’album, qui présente une tranche toilée et des angles de pages arrondies, à l’apparence des différents personnages, fidèle à celle qu’ils arboraient dans les premiers courts-métrages. Cosey s’approprie le style Disney avec une facilité déconcertante et livre un album de très belle qualité, fidèle dans l’esprit aux bandes dessinées Mickey sans tomber dans la nostalgie facile. Il apporte par exemple quelques touches de modernité en faisant de Minnie un personnage assez féministe, voire avant-gardiste, s’insurgeant contre la passivité d’un personnage féminin dans le script qu’écrit Mickey. Cosey fait ainsi sortir le personnage du rôle conventionnel de petite amie attentionnée et montre comment elle a pu fasciner la souris aux grandes oreilles. On saluera également le très beau travail de colorisation effectué pour cet album, qui évoque clairement les bandes dessinées de l’époque.
Un hommage au style maîtrisé
Une mystérieuse mélodie est donc, à l’instar de Mickey’s Craziest Adventures, une franche réussite qui augure du meilleur pour cette nouvelle série initiée par Glénat. Se distinguant clairement de l’album de Lewis Trondheim et Nicolas Keramidas sorti parallèlement, Cosey s’approprie l’univers des premiers courts-métrages et bandes dessinées Mickey pour proposer au lecteur une aventure en forme d’énigme à résoudre, légère et humoristique à la fois, rendant un bel hommage au cinéma et à des personnages auxquels il est visiblement attaché. Si la caractérisation de ces derniers est respectée, l’artiste ne tombe pas pour autant dans un excès de bons sentiments, qui est souvent rattaché à l’univers de Mickey. Au lieu de cela, il apporte quelques touches bienvenues de malice, tout en restant cohérent avec l’univers originel.
Le style de Cosey, que ses admirateurs reconnaîtront sans mal, s’accommode particulièrement bien de l’univers Disney, auquel il apporte une bonne dose de mystère, notamment grâce à de beaux clair-obscurs permettant de faire fonctionner l’imagination des lecteurs. Les deux albums suivants de la collection, respectivement conçus par Loisel et Tebo et dont nous avons pu découvrir une case dans le dossier de presse, s’annoncent déjà comme des œuvres singulières au ton et au style radicalement différents. Si ces BD sont aussi abouties que ces deux premiers titres, il est sûr que nous tiendrons là une série d’une qualité remarquable, réinterprétant le monde de Mickey et ses amis de manière passionnante.