Il y a bien des fois où la réalité dépasse la fiction. Ce fut encore le cas récemment, entre 2011 et 2012, lorsqu’une enquête fut menée à Marseille sur différents trafics. Rien que du banal penseront certains mais cette fois, les principaux suspects sont des agents de la police, parfois hauts placés… Frédéric Ploquin a mis en avant cette histoire rocambolesque dans son livre Vol au-dessus d’un nid de ripoux.
Un contexte politisé
Cette incroyable enquête débute en août 2011, à peine un an avant l’élection présidentielle. Marseille est depuis longtemps connue pour ses activités criminelles en tout genre mais ce n’est pas tout à fait pour cela qu’Alain Gardère y est envoyé. Ce proche de Nicolas Sarkozy doit également se renseigner sur des rumeurs de corruption au sein de la BAC, Brigade Anti-Criminelle, prestigieuse unité qui jouit d’un statut particulier à la fois parmi les policiers mais aussi dans la population. Tout au long de cette enquête, l’auteur de Vol au-dessus d’un nid de ripoux retrace les différents événements qui ont abouti à la dissolution de cette section d’élite. Il a cherché à réunir tous les témoignages, d’anciens policiers, habitants de cités marseillaises sensibles mais surtout celui d’Alain Gardère, qui nous livre ici le cheminement de son action.
Une enquête très complète
Comme évoqué, le journaliste d’investigation Frédéric Ploquin a eu un accès privilégié aux différents protagonistes mais également à toutes les pièces du dossier de l’Inspection Générale des Services (IGPN) et en particulier à ce qui a permis ce coup de filet inédit : le compte-rendu d’une année d’écoute des policiers corrompus de la brigade anti-criminalité. Certains passages sont retranscrits dans ce Vol au-dessus d’un nid de ripoux et autant dire qu’elles ne laissent pas de doutes sur l’ambiance qui régnait parmi ces groupes. Ces hommes, suspectés de préférer accepter l’argent des gangs plutôt que de les combattre, formaient un groupe uni et solidaire qui n’hésitait pas à menacer ceux qui n’allaient pas dans leur sens. Ainsi on retrouve des témoignages d’anciens policiers qui ont vu leur carrière s’achever brutalement car trop épris de conscience et d’honnêteté pour participer au trafic. Des acteurs de la société civile sont aussi représentés notamment par des parents soucieux de l’avenir de leurs enfants qui ont décidé de se lever non seulement face aux bandits qui gangrènent leurs quartiers mais aussi aux policiers, tenant de la justice mais préférant l’individualisme.
Une affaire inédite
La tempête décrite par Vol au-dessus d’un nid de ripoux se met en route à la fin de l’année 2012 lorsque le scandale éclate, personne ne sera épargné. On découvre petit à petit l’ampleur des dégâts de ce système mis en place depuis des années et connu par de très nombreuses personnes. La stupéfaction est totale lorsqu’il est annoncé que les responsables avaient fermé les yeux sur leurs équipes, même s’ils n’y participaient pas. Ils étaient complices de ces agissements d’une manière certes indirecte mais avec tout autant de culpabilité. Manuel Valls, alors ministre de l’Intérieur, va demander une révision du fonctionnement de la BAC (y compris le recrutement), puisque sera vite pointé du doigt le piédestal sur lequel ces unités sont posé, qui a largement contribué à renforcer leur sentiment de d’impunité. Cette affaire surréaliste est annoncée d’office par le titre de ce livre, référence au film bien connu Vol au-dessus d’un nid de coucou. On se croirait au cœur d’un roman noir, sauf que là tout est vrai. Le seul bémol que l’on peut notifier est l’écriture, assez sèche ; il faut alors s’accrocher pour continuer car chaque information vaut le détour.
Vol au-dessus d’un nid de ripoux, un livre écrit par Frédéric Ploquin. Aux éditions J’ai Lu, 315 pages, 7.50 euros. Au format poche, sortie le 13 avril 2016.