Un trip aussi référentiel que sincère
Ce livre que nous abordons aujourd’hui, Les Bracas, au éditions Bragelonne (Arkane tome 1 : la désolation, Existence), a une saveur toute particulière. De celle qui vous arrache quelques sourires, mais aussi de petits moments mélancoliques. L’ouvrage est posthume, et l’auteur, Dylan Pelot (de son vrai nom Pierre-Dylan Grosdemange, mort d’une attaque cérébrale à 44 ans), était un sacré phénomène. Grand connaisseur du cinéma bis, voire Z, celui qui fut aussi surnommé « le Dydiche » était un véritable touche-à-tout, capable de jouer de la basse dans des groupes musicaux, mais aussi d’illustrer des livres pour les jeunes (écrits par son père, comme Vincent, le chien terriblement jaune). Mais c’était surtout sa passion pour les films « autres » qui l’a mené à écrire Les Bracas, une œuvre parfois un peu maladroite mais qui sent bon la sincérité.
Les Bracas, c’est l’histoire de Sacha, un garçon fan de films de série Z,de hard rock, et d’effets spéciaux « faits maison » (ou, plutôt, au fond du garage). Mais ce qui le motive réellement, c’est sa bande de potes, sans elle rien n’aurait la même saveur. C’est d’ailleurs avec Zinzin, Pilpoil, Fox, P’tit Ji et Taquet que Sacha (ou Cha, pour les intimes) compte bien passer son hiver à tourner son tout nouveau court-métrage, évidemment un film d’horreur qui devrait véritablement lancer leur carrière, pour de bon cette fois-ci. Seulement, leur plan parfait est mis à mal, car des manifestations pour le moins surnaturelles commencent à frapper Sacha : sa maison est clairement visitée par un esprit, lequel change les objets de place. Serait-ce dû à cette étrange météorite, qui passa jadis par le ciel vosgien ? Ou est-ce la faute de Milo, un étrange italien vivant claquemuré avec son chien, à l’orée des bois ? La bande va mener l’enquête…
Un univers qui parlera aux amateurs de films de série Z
La superbe illustration de la couverture, signée Julien Solé, annonce parfaitement la tonalité qui s’étendra tout au long de Les Bracas. Entre Les Goonies et les tentacules « à la Cthulhu » afin de bien signifier où l’on met les pieds, avec une bonne dose d’esprit à la convergence de Fluide Glacial et de la musique Hard Rock, l’ouvrage nous emporte dans un univers très atypique, et évidemment référentiel. Le chat qui s’appelle Ozzy, par exemple, ne peut cacher l’amour de l’auteur pour le bon gros rock qui déchire. Les citations de The Thing, de Gotlib, se chargent de prouver à quel point l’écrivain avait bon goût. Dès les premières pages, on est entraîné dans un tourbillon de sentiments, qui vous seront tout particulièrement familiers si vous êtes du genre à apprécier l’esprit eighties. Les dialogues sont typiquement marqués par une envie de s’y rapporter, avec un aspect cool bien senti.
Malheureusement, la trame de Les Bracas est peut-être un peu moins agréable, car trop hachée. Une fois que le trip est digéré, la suite a du mal à se mettre en place, et l’on pourra trouver quelques passages un peu longuets. La rencontre avec Milo relance toutefois très bien le récit, mais pour cela il faudra attendre le dernier tiers. Cependant, on ne peut que lire certains passages avec une véritable nostalgie. Si Dylan Pelot n’a peut-être pas assez maîtrisé son histoire, on ne peut que souligner son authentique amour pour le cinéma bis. Chaque page en est imprimé, jusqu’au dernier chapitre qui, sans ne rien spoiler, pourra rappeler bien des souvenirs aux lecteurs de Mad Movies, et votre humble serviteur ne peut cacher avoir parfois soupiré de plaisir. Les Bracas est parfois un chouïa joyeusement branque, mais toujours authentique, et cette dernière qualité est bien à l’image de son auteur. C’est aussi celle que l’on retiendra de cet ouvrage, assurément.
Les Bracas, un livre écrit de Dylan Pelot. Aux éditions Bragelonne, 316 pages, 20 euros. Paru le 19 avril 2017.