[Critique] La malédiction de Rowans – Carey, Perkins, Troy

Caractéristiques

  • Auteur : Mike Care, Mike Perkins, Andy Troy
  • Editeur : Delcourt
  • Collection : Contrebande
  • Date de sortie en librairies : 31 mai 2017
  • Format numérique disponible : Oui
  • Nombre de pages : 96
  • Prix : 15,95€
  • Acheter : Cliquez ici
  • Note : 4/10

Une maison hantée pas très stimulante

L’horreur et le comics, voilà une entente qui ne date pas d’hier, et ce même si l’on a tendance à l’oublier. Les figure classiques de l’épouvante ont évidemment, et très vite, tiré leur épingle du jeu, avec des adaptations de Poe, ou de Frankenstein par exemple. Bien des années plus tard, la France découvre cette richesse des genres, parfois un peu éclipsée par la toute-puissance des supers héros, décidément plus qu’omnipotent. Delcourt (Strangers In ParadiseJames Bond Tome 2) est à la pointe de ce travail, l’éditeur n’hésitant pas à lancer des one shots parfois risqués, mais toujours dans un esprit d’approfondissement qui ne peut que rendre service au neuvième art. La malédiction de Rowans fait partie de ces œuvres un peu sorties de nulle part (du moins, pour les non-initiés), mais qui nous rendaient curieux.

La malédiction de Rowans est un récit qui s’inscrit dans l’archétype de la maison hantée.. Lorsqu’on propose à Katie, une jeune Américaine, un échange d’habitation avec une jeune Anglaise, elle saute sur cette occasion unique de pouvoir passer l’été au domaine de Rowans, une vieille demeure accueillante. Mais elle comprend très vite que quelque chose cloche et décide d’enquêter sur ce lieu. Elle va rapidement se rendre compte que parfois, il est préférable de ne pas réveiller le passé. Surtout quand celui-ci semble ne pas vouloir s’effacer.

La malédiction de Rowans part sur de bonnes bases. En effet, le conflit et la motivation du personnage principal, Katie, ont un petit côté crédible assez agréable. Et la narration du comics, qui utilise la figure du point culminant à rebours (on vous dévoile une situation très avancé de l’histoire, puis le cheminement pour y arriver) fonctionne plutôt bien. Par contre, on décèle, sans pour autant en tenir rigueur lors des premières pages, une propension à vouloir placer des thématiques traitées de manière militantes. Et cela, on est un peu moins fan, car cela s’accompagne souvent d’une caractérisation des protagonistes peu inspirée et agressive. Damned, ça se vérifie ici.

Une héroïne qui ne créée pas d’empathie

La malédiction de Rowans loupe le coche à cause d’un personnage principal à la limite du supportable. Katie est une blogueuse, rien de mal à cela, mais elle en embarque tous les côtés les plus irritants que l’on peut imaginer, comme autant de clichés exacerbés. Bien évidemment, quand la jeune femme débarque en Angleterre, elle trouve l’endroit vieux, et se borne à en aborder un passé qu’elle décrit comme immonde. Heureusement, avec un peu d’ouverture (mais vraiment le strict minimum, faut pas pousser), Katie va aller vers l’autochtone. Pas de bol pour elle, il faut qu’elle tombe sur le mâle typique, véritable cliché d’un féminisme extrême peu recommandable. Heureusement, elle sera sauvée par un policier dans l’exercice de ses fonctions, et cela se terminera par un flirt. Ne vous emballez pas, l’homme sera bien vite dénoncé par la blogueuse comme incroyablement intrusif (il ne produit rien qui puisse être caractérisé de tel). Alors, elle ira se réfugier chez la bibliothécaire, une femme (ouf, on est sauvé !), donc «safe» bien comme il faut, et digne de confiance. N’en jetez plus, on a l’impression d’atterrir dans une discussion sur Twitter autour des hommes blancs, privilégiés, carnistes et reptiliens, c’est très pénible.

Et le comics fonctionne-t-il dans son récit purement horrifique ? Il nous embarque, c’est déjà pas mal, mais il n’emballe pas pour autant. La malédiction de Rowans reste une histoire assez simple (mais pas simpliste, ne confondons pas), et l’enquête ne réserve pas vraiment de grands moments de tension. On n’a absolument rien contre le classicisme du sous-genre de la maison hantée, bien au contraire : ses codes ont tendance à créer une ambiance apte à parvenir aux fins d’un récit d’épouvante. Mais l’écriture a quelque chose d’ampoulé, elle en fait trop par rapport à ce qu’elle propose. Et, c’est toujours à prendre en compte : il est compliqué de suivre des personnages pour lesquels on ne ressent aucune empathie. La fin, par contre, est une réussite, parvient même à un peu nous décontenancer, et même à sauver la globalité d’un naufrage pourtant assuré.

Le dessin, signé par Mike Perkins (Le Fléau) souffle le chaud et le froid. La malédiction de Rowans peut tout autant provoquer de bonnes émotions à l’occasion de certains décors (la maison est très réussie), que provoquer des réserves sur les corps. En effet, certaines cases sont marquées par des soucis dans les proportions des mains, par exemple. Aussi, les visages sont parfois trop grimaçant, et soulignent trop les sentiments. Enfin, le coloriste Andy Troy (Clone) rend un travail plutôt bon, avec des teintes qui provoquent une vraie différence entre le réalisme de certaines situation, et l’horreur contenue dans d’autres. Au final, ce comics est une petite déception. Trop agressif et extrême dans le traitement de son personnage principal, qui en devient carrément insupportable. Par contre, et comme toujours, il faut préciser que l’édition de Delcourt est plus que qualitative. C’est déjà ça.

Article écrit par

Mickaël Barbato est un journaliste culturel spécialisé dans le cinéma (cursus de scénariste au CLCF) et plus particulièrement le cinéma de genre, jeux vidéos, littérature. Il rejoint Culturellement Vôtre en décembre 2015 et quitte la rédaction en 2021. Il lance Jeux Vidéo Plus. Manque clairement de sommeil.

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