[Critique] Si les chats pouvaient parler – Piergiorgio Pulixi

Caractéristiques

  • Titre : Si les chats pouvaient parler
  • Auteur : Piergiorgio Pulixi
  • Editeur : Gallmeister
  • Date de sortie en librairies : 8 octobre 2025
  • Format numérique disponible : oui
  • Nombre de pages : 528
  • Prix : 23,90 euros
  • Acheter : Cliquez ici
  • Note : 6/10

Auteur sarde parmi les plus en vue de la nouvelle génération italienne de romanciers noirs, Piergiorgio Pulixi s’est imposé avec des titres tels que L’Île des âmes (prix Scerbanenco) ou L’Illusion du mal (prix Fedeli). Traduit dans une vingtaine de pays, il revient cet automne chez Gallmeister avec Si les chats pouvaient parler, deuxième volet des aventures de Marzio Montecristo. Un cosy mystery ensoleillé et plein de verve, qui amuse sans vraiment surprendre.

Une croisière littéraire qui tourne au drame

La librairie de Marzio Montecristo, Les Chats Noirs, est invitée à participer à un événement pour le moins original : une croisière autour de la Sardaigne où le célèbre auteur de polars Aristide Galeazzo doit rédiger en direct les derniers chapitres de son nouveau roman. Peu enchanté à l’idée d’embarquer, le libraire grincheux se laisse pourtant convaincre, y voyant une belle vitrine pour son commerce. Il entraîne avec lui l’inspecteur Caruso, futur membre du club de lecture des « Enquêteurs du mardi », ainsi que ses deux compagnons félins, Poirot et Miss Marple. Mais à peine le voyage commencé, un meurtre vient perturber la croisière idyllique et le navire se transforme alors en scène de crime flottante. Nul ne peut plus débarquer et chacun devient suspect…

Avec ce deuxième volet des aventures de Marzio Montecristo, Piergiorgio Pulixi revendique ouvertement son appartenance au cosy mystery, ce sous-genre du roman policier où la violence  reste hors champ et où l’enquête se déroule dans une communauté familière. Sur fond de mer houleuse et de conversations littéraires, l’auteur joue avec les codes du genre, revisitant le modèle d’Agatha Christie dans une ambiance méditerranéenne. Huis clos, suspects hauts en couleur, dialogues caustiques et humour omniprésent… Tout concourt à faire de cette croisière un clin d’œil appuyé à Mort sur le Nil, dont Pulixi transpose le raffinement et le jeu d’illusions à l’île sarde qu’il affectionne.

Entre satire littéraire et comédie féline

Fidèle à lui-même, le libraire bourru à la langue bien pendue accueille ses clients avec un mélange de sarcasme et de mauvaise foi qui ferait fuir le plus courageux des lecteurs. Son franc-parler et son humour grinçant constituent l’un des principaux ressorts comiques du roman, tout comme les échanges savoureusement acides qu’il entretient avec son acolyte, l’inspecteur Caruso. Entre piques, insultes et chamailleries, le duo forme un tandem irrésistible de mauvaise humeur et d’intelligence mordante. Cependant, au détour d’une scène, un sujet plus grave s’invite : la démence sénile et la maladie d’Alzheimer, incarnées par le personnage de Nunzia. Cette présence apporte une note d’émotion inattendue, contrepoint discret mais bienvenu au comique sarcastique ambiant.

Le roman se déroule à bord d’un bateau ironiquement baptisé Mise en abyme, où gravitent auteurs à succès, éditeurs prestigieux et acteurs en quête de notoriété. Tout un « gratin littéraire » où l’ego rivalise avec la vanité, que Pulixi croque avec un mélange d’ironie et d’affection. La langue de l’auteur, soignée et souvent soutenue, souligne cette double tonalité : celle d’une satire enjouée et d’un hommage sincère au monde des lettres. Les descriptions sont précises, vivantes, et ancrent le récit dans un cadre résolument italien, entre dialectes, accents régionaux et arômes de vin sarde. Si l’auteur flirte parfois avec la caricature, sa gouaille et ses nombreuses références littéraires et cinématographiques assurent au roman un charme certain.

Un cosy mystery en demi-teinte

Pourtant, malgré son cadre séduisant et son ton enlevé, Si les chats pouvaient parler souffre d’un début laborieux. Les cent premières pages donnent une impression de remplissage : les dialogues s’étirent, les personnages abondent sans que l’intrigue ne trouve encore son rythme. Le lecteur peine à s’y retrouver dans ce microcosme foisonnant, et l’histoire ne décolle véritablement qu’autour de la page 190. À partir de là, la mécanique s’enclenche enfin, et la tension monte peu à peu jusqu’à devenir réellement prenante.

Comme à son habitude, Pulixi excelle dans les dialogues, qui confèrent au roman un rythme fluide. Les chapitres sont courts, à l’image du roman qui n’excède pas les 300 pages, et l’écriture est efficace et addictive. Bien entretenu dans la seconde moitié du récit, le suspense joue habilement sur les fausses pistes et les motivations croisées des personnages. Chacun pourrait être coupable et le lecteur se plaît à formuler ses hypothèses au fil des pages. Après une longue série d’interrogatoires très théâtraux, la révélation finale, bien menée sans être véritablement surprenante, s’accompagne d’un clin d’œil affectueux au genre.

En définitive, Si les chats pouvaient parler reste un divertissement policier plaisant, servi par l’humour grinçant de Marzio Montecristo et la plume vive de Piergiorgio Pulixi. Mais derrière le décor sarde et les clins d’œil à Agatha Christie, l’ensemble manque un peu de souffle et de nouveauté. Un roman sympathique, sans doute, mais moins marquant que la première enquête du libraire des Chats Noirs.

Article écrit par

Lorsqu’elle n’enseigne pas l’italien, Lucie Lesourd aime discuter de sa passion pour le cinéma, le théâtre et les comédies musicales. Spécialisée en littérature young adult et grande amatrice de polars et thrillers, elle rejoint Culturellement Vôtre en février 2020 pour y partager ses avis lecture et sorties culturelles.

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