Bernie Rhodenbarr revient pour une dixième intrigue
Et de dix ! Dixième aventure pour Bernie Rhodenbarr, le héros inventé par Lawrence Block, auteur spécialisé dans le polar et le roman d’espionnage. Bernie est libraire le jour et voleur la nuit. Il fait sans aucun doute partie de ces personnages que l’on prend plaisir à retrouver, notamment grâce à la bonne continuité dont il fait l’objet. C’est ainsi que nos retrouvailles avec lui, intitulées Le voleur qui comptait les cuillères, débutèrent : sous de bons auspices.
Avec Le voleur qui comptait les cuillères, retour à la 11e rue Est de New-York, où se situe l’humble librairie de Bernie Rhodenbarr. Mais derrière cette couverture, Bernie n’en demeure pas moins un voleur de talent, et ses aptitudes sont toujours très prisées par un certain public. C’est ainsi qu’un jour, il reçoit la visite d’un étrange « M. Smith », un collectionneur qui souhaiterait récupérer quelques objets représentant une sacrée fortune. Mais cette mission va s’avérer plus périlleuse qu’elle n’en avait l’air de prime abord, et bientôt, les talents d’enquêteur de Bernie Rhodenbarr vont être mis à rude épreuve. D’autant que sa librairie reçoit des menaces troublantes…
Le voleur qui comptait les cuillères débute de manière bien nostalgique. Ou, plutôt, l’auteur y dresse un constat : lire est un acte qui perd de sa superbe, par le biais de moyens technologiques comme le téléchargement. Bien évidemment, Lawrence Block ne se lance absolument pas dans une analyse de fond de la situation, seulement, il est important de débuter avec ce genre d’ambiance un peu mélancolique, car cela aide à re-situer le personnage, et surtout à se re-familiariser avec le style de l’auteur. Ce dernier donne clairement dans le polar, et l’on peut même parler de roman noir ; on pense évidemment à Balade entre les tombes (qui a donné un bon film avec Liam Neeson). Après nous avoir même fait rire grâce à certains clients de la librairie, le récit peut réellement débuter.
Un récit basé sur les personnages
Le voleur qui comptait les cuillères, c’est avant tout une enquête, même si le roman nous plonge d’abord au milieu d’un vol. Celui-ci est décrit avec tout le talent que l’on connaît à Lawrence Block, capable de passer assez vite d’une situation légère, comique même, à une ambiance beaucoup plus précise, plus tendue, au suspense évident. C’est d’ailleurs lors de cette mission de haute voltige que le lecteur fera connaissance avec les cuillères, mais on n’en écrira pas plus afin de ne pas spoiler. C’est ensuite qu’intervient un événement qui va se charger de donner au roman une autre saveur, suite à quoi on va peu à peu se tourner vers le pur polar de divertissement.
La seule retenue que l’on pourrait formuler est à attribuer à quelques passages un peu trop bavards, et des descriptions parfois superflues. Mais dans l’ensemble, Le voleur qui comptait les cuillères assure largement l’essentiel de ce que l’amateur de Bernie Rhodenbarr peut chercher dans ses aventures. L’action en elle-même n’y est pas intense, sauf sur le passage très précis du vol. Lawrence Block préfère construire une ambiance, la polir, et privilégier les situations afin de développer ses personnages. Le héros est certes très attachant, mais c’est aussi le cas de tous le reste des protagonistes qui ont tous leurs petites spécificités. Ainsi, Le voleur qui comptait les cuillères se lit avec plaisir avant tout grâce aux relations qui se nouent entre les uns et les autres, et l’intrigue en elle-même arrive à créer la curiosité indispensable à ce genre de polar. Une bonne lecture, donc.
Le voleur qui comptait les cuillères, un roman écrit par Lawrence Block, traduit par Mona de Pracontal. Aux éditions Gallimard, collection Série Noire, 352 pages, 21 euros. Sortie le 13 octobre 2016.