[Critique] Oublier mon père — Manu Causse

Caractéristiques

  • Auteur : Manu Causse
  • Editeur : Denoël
  • Date de sortie en librairies : 23 août 2018
  • Format numérique disponible : Oui
  • Nombre de pages : 304
  • Prix : 19€
  • Acheter : Cliquez ici
  • Note : 6/10

Enseignant, Manu Causse s’est fait connaître grâce à son roman La 2 CV verte. Également auteur de livres jeunesse (Les intraterrestres), il mélange les genres quitte à ne jamais être où on l’attend. Avec Oublier mon père, il emmène ses lecteurs dans une quête d’identité à travers le Sud de la France et la Suède.

Le mensonge comme construction

Alexandre est un petit garçon sensible qui souhaite avant tout faire plaisir à sa mère. Cette mère qui s’est sacrifiée pour lui, qui a mis de côté sa carrière de documentaliste pour s’occuper de son fils, enfant spécial qu’elle préfère éduquer à coups de gifles et de culpabilisation à la maison. Son père est un photographe amateur passionné de ski avec qui il passe peu de temps seul et qui, lui aussi, cède face à son épouse trop envahissante et autoritaire. Alors qu’il n’a que neuf ans, son père décède dans un accident de voiture en Allemagne alors qu’il se rendait en Suède pour faire une course de ski. A partir de là, la mère d’Alexandre n’aura de cesse de le maudire et de tout faire pour qu’il disparaisse de leurs mémoires.

Passé une adolescence compliquée pleine de complexes et de rejets, Alexandre devient un adulte renfermé, timide, qui attire malgré tout les femmes. Mais quelles femmes ! Elles sont toutes plus ou moins des copies de sa mère, tant par leur caractère dur que par leurs violences intrinsèques. Maladif depuis toujours, il finit par apprendre une suite de révélations sur sa famille, ses parents et lui-même qui le pousseront à aller jusqu’en Suède, sur les traces d’un père qu’il aura tout fait pour oublier pendant des années. Alors seulement, à l’approche de la quarantaine et avec une aide inespérée, Alexandre pourra commencer à se construire en tant qu’homme.

Une marâtre comme modèle

Au-delà du personnage d’Alexandre qui suit une transformation tout au long du roman, le personnage le plus important est sans conteste sa mère. Madeleine Alary n’a jamais de gestes tendres ou affectueux envers son fils, elle se montre froide, colérique, manipulatrice et violente. Et d’un autre côté, elle se bat (ou plutôt menace) pour lui, pour s’assurer qu’on le laisse tranquille, qu’il puisse avoir une vie sociale. Rappelant la Folcoche de Vipère au poing, Madeleine a cela de différent qu’on entrevoit chez elle une possibilité d’amour envers son fils, bien qu’il ne soit jamais exprimé. Lorsqu’elle invente la maltraitance du père pour s’assurer qu’Alexandre ne sera jamais tenté de le retrouver, c’est à la fois une femme mauvaise prête à tout pour parvenir à ses fins, mais aussi une femme blessée qui agit par impulsion. Grandissant dans l’ombre de cette mère, Alexandre n’a qu’elle comme modèle et arrive à l’âge adulte sans aucun bagage social, si ce n’est le rejet et les démonstrations de violence comme normalité, voire preuves d’amour.

Le père, élément nécessaire à l’identité masculine ?

C’est ce que Manu Causse veut montrer via le parcours d’Alexandre. Lorsqu’il apprend la vérité sur l’accident de voiture, il est poussé à rechercher les traces de la vie passée de cet homme qu’il a si peu connu et qu’il a même appris à détester, via sa mère. Une fois qu’il apprend la vérité, il a du mal à l’accepter et il lui faudra de l’aide et du temps pour pouvoir commencer un chemin initiatique vers la construction de son identité. Cette aide lui viendra d’une femme, sorte de demi-sœur qui a vécu avec son père durant des décennies, faisant comme un équilibre avec la mère qui l’a écrasé durant des années. Johanna est la face inverse de Madeleine, patiente et à l’écoute d’un Alexandre qui n’a pu se réaliser tant le manque de père était une blessure profonde et intense. De même, la Suède est l’opposée du sud de la France, comme si le changement se devait d’être radical pour pouvoir avoir un impact.

Oublier mon père est de ces romans où l’on suit la transformation d’une personne. Tour à tour léger, révoltant, agaçant, avec des personnages qui ne laissent pas indifférent, Manu Causse signe un roman initiatique plutôt réussi et précise bien que toute ressemblance avec sa propre mère ne serait que fortuite.

Article écrit par

Chez Marion, les livres, c’est sacré. Elle s’en entoure et les emporte partout. Il était donc logique qu’elle rejoigne Culturellement Vôtre, où elle contribue principalement à la rubrique Livres. Romans historiques, chick-lit, thrillers féminins ou essais historiques, elle dévore tout ce qui lui passe sous la main, œuvres sérieuses comme plus légères, en faisant fi des étiquettes. Elle adore les chats.

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