Caractéristiques
- Auteur : Rensuke Oshikiri
- Editeur : Mana Books
- Date de sortie en librairies : 4 juillet 2019
- Format numérique disponible : Non
- Nombre de pages : 193
- Prix : 7,90€
- Acheter : Cliquez ici
- Note : 9/10 par 1 critique
Une œuvre d’une richesse réjouissante
Vous souvenez-vous quand, au début des années 1990, le manga était résumé à Dragon Ball ? N’empêche, le Club Dorothée, à l’époque vilipendé par ceux qui, aujourd’hui, voient leur côte de popularité plus basse que jamais (n’est-ce pas, Ségolène Royal), est parvenu à insufflé une dynamique. Certes, on avait tous le regard braqué sur DBZ, Les Chevaliers du Zodiaque ou Olive et Tom. Mais, à côté, on oublie peut-être que c’est aussi grâce à cette émission qu’on a pu découvrir Fly (donc Dragon Quest !), Le Collège fou, fou, fou, Les Samouraïs de l’Éternel, et bien d’autres. Du coup, le public en a voulu plus. Ce fut le tour d’Akira, de Gumn, Animeland a débarqué. Et, aujourd’hui, plus personne ne doute de l’offre gigantesque venue du Japon. Dans celle-ci, on trouve de sacrée réussites. Dont cet Hi Score Girl, qui parait aux éditions Mana Books (Art Of Mana, Persona 3), l’une des plus belles perles du moment.
On ne va pas le cacher : si le titre est connu par beaucoup, nous ne savions rien de lui avant de le découvrir à cette occasion. Pourtant, High Score Girl est un véritable phénomène, si bien que l’œuvre a été déclinée en série animée, sur Netflix. Et, quand on s’est pris de passion pour ce premier tome, on nous l’a de suite conseillé. C’est dire s’il se passe quelque chose autour du manga de Rensuke Oshikiri, un artiste dont le nom ne cesse de prendre de l’envergure. Et l’on ne peut que le comprendre : ce qu’on vient de lire est aussi simple que captivant. Le récit débute en 1991, et s’articule autour de deux piliers : le jeu vidéo, et un romantisme enfantin rigolard mais bien touchant.
On est donc en plein âge d’or du jeu vidéo japonais, dans les années 1990. High Score Girl en profite pour nous présenter deux jeunes personnages : le très passionné, mais aussi bourru, Haruo, élève de fin de primaire. Son grand hobby : le gaming. Il passe son temps libre dans les salles d’arcade malfamées du coin, achète des consoles, des jeux avec le peu d’argent de poche qu’il reçoit d’une mère aux revenus très modeste. Un jour, alors qu’il pensait dominer les débats sur Street Fighter 2, il enchaine sept défaites d’affilée. Le coupable ? Akira, une fille de sa classe, bourgeoise, intelligente, qui ne pipe mot, toute mignonne mais armé d’un sacré caractère. Celui-ci se fait d’autant plus marquant que l’écolière ne prononce pas un mot : tout, à son propos, passe par le dessin d’une efficacité indéniable. Arrêtons-nous là. Vous êtes effrayés par ce qui pourrait suivre, les potentielles leçons de morale, du féminisme extrémiste à deux balles ? Rassurez-vous, si Rensuke Oshikiri joue avec les clichés, il est infiniment plus finaud que ce qu’on pouvait craindre.
Rensuke Oshikiri, une étoile montante
High Score Girl Tome 1 ne tente pas de nous faire comprendre quoi que ce soit autrement que par son récit. Et l’effet se révèle exemplaire. En vérité, on a tous été, à un moment donné de notre vie, cet Haruo qui se prend le mur du réel dans la tronche. Votre dévoué serviteur le premier, cela fait désormais bien longtemps que la digestion est faite : oui, les filles peuvent aussi jouer comme des bêtes, et être passionnées par les jeux vidéo. Et bon sang, tant mieux ! Haruo ne remet pas en cause cela, on ne tente pas d’en faire un petit beauf de l’école primaire, c’est plus subtil. Il capte assez vite le don d’Akira, et il n’est jamais discuté. Il doit juste comprendre que son enthousiasme peut être partagé. Le fond de l’œuvre va se faire autre part, là où ça devient beaucoup plus intéressant. Avec beaucoup d’humour, lequel fait ressortir d’autant plus les émotions, on se rend compte que les deux enfants doivent assumer une passion débordante, mais freinée par des éléments extérieurs, comme l’éducation très stricte de la petite fille.
High Score Girl Tome 1 s’articule en plusieurs petites histoires, de petits récits que l’on pourrait croire anecdotiques mais qui, avec subtilité, nous permettent de comprendre de mieux en mieux l’état d’esprit de ces deux écoliers. On pense notamment à cette partie qui les voit prendre la route, à vélo, afin de rechercher une salle d’arcade légendaire, qui proposerait des parties à très bas prix. On y trouve même un tout petit goût de Ghibli, pour utiliser une référence populaire, même si l’auteur préfère rester plus proche de l’humour de la situation que de sa saveur fantastique. Le résultat est incroyablement fluide, on a dévoré ce volume comme rarement. Et croyez-nous : la toute fin de ce premier volume est de l’ordre du gros twist qui va en scier plus d’un. Signalons ici le très, très gros travail de traduction effectué par Baptiste Fureau, qui joue intelligemment avec les codes japonais, mais aussi occidentaux. Voilà un modèle d’adaptation plaisante.
High Score Girl Tome 1 parvient donc à nous émouvoir de différentes façons, et sans chercher à nous faire la leçon sur quoi que ce soit. Il parlera aussi beaucoup, mais vraiment beaucoup, aux amateurs de jeux vidéo. On peut même parler de déclaration d’amour à cette passion, et ici plus particulièrement au rétrogaming. On y trouve des références qui ont fait chavirer notre petit cœur de gamer. L’exemple le plus probant concerne le segment consacré à la PC-Engine. Haruo fait découvrir cette console mythique (on était très Nintendo à cette époque, mais c’est Nec qui proposait le meilleur matos, il faut être objectif) à Akira, avec des arguments que l’on sent sortir du cœur d’un mangaka gamer. On se trompe peut-être, mais on imagine bien Rensuke Oshikiri se projeter dans cette histoire. Et nous ? Eh bien, on attend la suite avec une impatience rarement atteinte ces derniers temps. Aller hop, coup de cœur !