Caractéristiques
- Auteur : Bradley P. Beaulieu
- Editeur : Bragelonne
- Date de sortie en librairies : 17 août 2016
- Format numérique disponible : Oui
- Nombre de pages : 575
- Prix : 25€
- Acheter : Cliquez ici
- Note : 8/10 par 1 critique
Le début d’une nouvelle grande série
On entend parfois de bien mauvaises langues avancer que le genre de la fantasy est, bon sang comme c’est grandiloquent, mort. Chez Culturellement Vôtre, on ne partage pas cet avis, et si les gros morceaux destinés à devenir des classiques sont effectivement de plus en plus rares dans nos librairies, certains tirent tout de même leur épingle du jeu. C’est clairement le cas de ce premier tome de la série Sharakhaï, sous-titré Les Douze Rois De Sharakhaï, attendu de pied ferme par les fans de ce genre littéraire si (trop ?) surveillé. La grande Robin Hobb faisait monter l’attente d’un cran en déclarant : « Une histoire d’envergure, livrée par une grande plume« , et Glen Cook ne tarit pas d’éloges dessus. Encore fallait-il que cela se vérifie livre en mains.
Sharakhaï Tome 1 : Les Douze Rois De Sharakhaï prend place dans la cité de… Sharakhaï. Laquelle est dirigée par douze souverains immortels protégés par une garde rapprochée terrifiante, qui exercent un pouvoir cruel depuis bien trop de siècles. On s’intéresse plus précisément à Çeda, combattante émérite qui gagne sa survie tous les jours dans les arènes de Sharakhaï. Mais un jour, la jeune femme de 19 ans ose sortir lors de la nuit de Beht Zha’ir, alors que l’unité des asirim, qui font partie des gardes du corps des rois, hantent la cité de leur odieuse présence. Seulement, ces spectres semblent avoir beaucoup à dire, du moins pour qui comprend leur langue. Étrangement, c’est le cas de Çeda qui se voit confié un murmure par un asirim coiffé d’une couronne en or. Il devient alors indéniable qu’il existe un lien entre les douze tyrans et l’histoire de la jeune et courageuse femme, et il pourrait bien changer le destin de Sharakhaï.
Sharakhaï Tome 1 : Les Douzes Rois de Sharakhaï, c’est la promesse d’un dépaysement total en seulement quelques pages. Jouons cartes sur table dès le début : Bradley P. Beaulieu a réussi un véritable tour de force basé sur la création d’une ville que l’on qualifie sans mal de perceptible. On pourrait presque la placer sur une carte de notre monde, tant l’univers décrit, même si éminemment fantastique et ne rechignant pas à faire appel à une mythologie interne irréaliste, nous paraît plein de vie. L’auteur redouble d’adresse pour construire tout un cosmos que le lecteur s’approprie avec une facilité assez déconcertante, notamment en décrivant une technologie florissante et bien en rapport avec la situation de Sharakhaï : en plein désert. On pense notamment au Zilij, sorte de surf praticable sur le sable. Autre élément qui nous rend cette cité tangible, ses rapports politiques avec les autres Royaumes environnant, mais nous n’en écrirons pas plus histoire de ne pas spoiler. Sachez juste que cet univers est pensé jusque dans sa géopolitique, l’auteur n’a rien laissé au hasard.
Bien des éléments mémorables dans ce grand moment de fantasy
Sharakhaï Tome 1 : Les Douze Rois de Sharakhaï s’intéresse donc à Çeda, jeune femme de dix-neuf ans qui représente une des autres grandes réussites du roman. On s’y attache très vite grâce à la complexité justifiée de sa personnalité. Loin d’être une héroïne stupide et un peu bimbo sur les bords, Çeda est présentée comme une combattante de talent, qui combat dans les arènes de Sharakhaï sous le surnom de Louve Blanche. Mais ce n’est pas tout, car cette ancienne voleuse (ce qui lui apporte aussi des capacités furtive à ne pas sous-estimer) trouve encore le temps de livrer des colis important et donne aussi des leçons d’escrime. Un quotidien du genre chargé et dangereux, qui n’exclu pas une certaine sensibilité malgré une rage folle. Elle est une fonceuse, encore un peu jeune, mais on perçoit en elle un grand potentiel. Le destin de Çeda est évidemment appelé à connaître un « boost », ici une révélation qui va la remettre en selle quant à ses doutes concernant les causes de la mort de sa mère. Elle devra se mettre en quête de vérité, et pour se faire elle ne sera pas seule car deux autres personnages désirent remonter la piste jusqu’aux douze rois de Sharakhaï : son ami en quête de vengeance Emre, et le dramatiquement veuf Ramahd. Ce trio offre assez de sentiments différents pour ne jamais créer cette impression de redite qui peut parfois surgir au sein de certains romans de fantasy. Bradley P. Beaulieu maîtrise ses situations et joue des différents points de vue pour continuellement relancer le récit.
Sharakhaï Tome 1 : Les Douze Rois de Sharakhaï ne serait pas un coup de cœur sans des antagonistes au niveau des autres réussites du roman. Heureusement, ces souverains maléfiques sont carrément envoûtants, on a même tendance à les tenir comme la plus grande force du roman ! Chacun des rois a sa spécificité, même si évidemment certains sont plus mis en valeur que d’autres (pour le moment ?). Leur background est assez développé pour que le lecteur puisse atteindre le même niveau de crainte que les habitants de Sharakhaï, et l’on ne comprend que mieux l’aversion du trio de personnages principaux. Devenus immortels de puis 400 ans suit à un pacte avec des Dieux sans vergogne, ces tyrans dirigent la ville avec une cruauté exacerbée, provoquant par ailleurs des séquences d’une certaine violence. Signalons par ailleurs que Bradley P. Beaulieu n’hésite pas à décrire des situations éprouvantes, tant au niveau sexuel que de l’action. Les douze rois, et leurs pouvoirs impressionnants, forment une véritable menace, et certains d’entre eux seront particulièrement sous les feux des projecteurs. On pense notamment à Ihsan, qui a même droit à des chapitres dédiés. Ces antagonistes forment un groupe qui hante le récit, mais aussi l’esprit du lecteur.
Une fois que le roman a assuré ces trois points forts, il ne lui reste plus qu’à dérouler structurellement jusqu’à la fin, sur ses 63 chapitres. Sharakhaï Tome 1 : Les Douze Rois de Sharakhaï se conclue peut-être un peu abruptement, le dernier acte est sans doute un peu en-dessous des autres. Mais on est tellement sous le charme de cet univers qu’une seule impression persiste en fin de lecture : celle d’assister à la naissance d’une série grandiose, dont on espère que la suite sera au moins au niveau…