[Critique] Halabeoji – Martine Prost

image couverture halabeojiComme nous vous en avions informé dans une news dédiée, l’Asiathèque version 2016 est un véritable vent de renouveau. La maison d’édition mettra à l’honneur les littérature coréenne et taïwannaise, tout en ouvrant son catalogue à la fiction. La Corée, qui sera l’invité d’honneur du prochain Salon du Livre de Paris (du 17 au 20 Mars 2016), est une culture encore assez méconnue en France, même si son cinéma connaît un succès d’estime depuis une quinzaine d’années. Pour nous aider à faire la lumière sur l’incroyable profondeur de ce qu’a à offrir le pays du matin calme, l’Asiathèque a prévu tout un programme, et pour le moment nous allons nous attarder sur Halabeoji, une œuvre écrite par… une française. Deuxième livre de la collection Liminaires, après Une Tablette aux Ancêtres (Stéphane Corcuff), le principe fait la part belle au témoignage, sous forme d’un texte court.

L’auteure de Halabeoji n’est nulle autre que Martine Prost, connue pour sa connaissance pointue de la Corée, au point d’être partie vivre dans son pays d’adoption. Et le moins que l’on puisse dire est que cette maîtrise traverse son œuvre comme une évidence. Halabeoji signifie “grand-père”, et le livre est une sorte d’analyse de cette figure familiale, que nous découvrons avec passion. L’auteure, dont la plume semble en état de grâce tant le style est limpide, nous raconte un morceau de vie, en Corée, et ses rapports avec la tradition. Et le langage. Car la grande réussite de Halabeoji est d’avoir réussit à raccorder les deux.

Le récit de Halabeoji nous plonge dans l’intimité d’une famille coréenne, pour mieux en faire ressortir une substantifique moelle faite d’un sens de l’humour très fin, et d’une apparente tendresse pour son pays hôte. Le grand-père du titre est, évidemment, l’intérêt central de Martine Prost. A travers lui, les rapports entre hommes et femmes sont disséqués. Alors, l’on pourra regretter que ce regard, qui vient de l’extérieur, s’accorde le droit de juger une culture sous le prisme de la sienne. C’est recevable, du moins jusqu’à un certain point. Car le témoignage de l’auteure est important, apporte une sorte de fraîcheur indéniable. Jamais, Martine Prost ne se place comme une donneuse de leçon. Avant tout car l’histoire, d’une humanité profonde, ne laisse jamais de place à ce genre de possibilité.

Dans Halabeoji, c’est même Martine Prost qui est jugée. Par le grand -père, dont le comportement pourra paraître quelque peu désuet mais qui, étrangement, pourra aussi nous paraître comme un magnifique témoignage, que l’on voudrait seulement voir un peu évoluer quant aux rapports entre hommes et femmes. L’auteure, et son mari Seung-geun (en français, Racine montante) se rendent chez le grand-père, afin de se plier au rituel des présentations. Un moment difficile pour Martine Prost, qui doit rester prostrée, et silencieuse, pendant que le Halabeoji, médecin de son état et fin lettré. Comme nous le soulignions plus haut, la grande force de ce livre est de jouer avec le langage d’une manière très maîtrisée. Le lecteur apprendra l’importance des noms dans ce pays, par exemple, en aura en tout cas une certaine idée. En parallèle, l’auteure s’accroche, et se verra peut-être adoubée par le grand-père…

Au final, Halabeoji est une œuvre courte, mais étonnamment équilibré. Le livre se lit très vite, sans temps mort. On pourrait même dire qu’il se dévore. Une très belle découverte, que nous recommandons aux lecteurs curieux d’autres cultures, mais aussi aux spécialistes du sujet, qui découvriront un point de vue au style plaisant.

Halabeoji, de Martine Prost. Aux éditions l’Asiathèque, collection Liminaires, 2016. 56 pages, 8€.

Article écrit par

Mickaël Barbato est un journaliste culturel spécialisé dans le cinéma (cursus de scénariste au CLCF) et plus particulièrement le cinéma de genre, jeux vidéos, littérature. Il rejoint Culturellement Vôtre en décembre 2015 et quitte la rédaction en 2021. Il lance Jeux Vidéo Plus. Manque clairement de sommeil.

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