Caractéristiques
- Traducteur : Sophie Refle
- Auteur : Cilla & Rolf Börjlind
- Editeur : Seuil
- Date de sortie en librairies : 19 avril 2018
- Format numérique disponible : Oui
- Nombre de pages : 400
- Prix : 22,50€
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- Note : 7/10 par 1 critique
Connus pour leurs scénarios (dont la série Wallander), Cilla et Rolf Börjlind ont créé un univers policier autour de personnages forts et ambigus. Après Marée d’équinoxe, ils reviennent avec Colère blanche aux éditions du Seuil (Killeuse, Bleu de Prusse, Offshore…) dans lequel on retrouve Olivia Rönning, qui va avoir à faire à des groupuscules néo-nazis bien décidés à utiliser tous les moyens pour « protéger » la Suède.
Racisme et sexisme en Scanie
Olivia Rönning est devenue enquêtrice en Scanie, comté à l’extrême Sud de la Suède, en face du Danemark. Cette région apparemment tranquille est bouleversée lorsqu’une fillette de trois ans est retrouvée morte dans son jardin, le cou tordu, alors qu’elle jouait dans le bac à sable. Face à ce crime odieux, un collègue d’Olivia fait remarquer que ce n’est pas comme si c’était une suédoise : en effet, la petite fille a été adoptée, elle venait du Ghana. Elle-même adoptée (voir Marée d’équinoxe), Olivia doit faire face à une mentalité particulière, très nationaliste; le comté est propice au développement des partis ouvertement néo-nazis réclamant la purification du sang suédois. Quelques jours plus tard, c’est un jeune garçon d’origine kurde vivant à Stockholm qui est retrouvé sur le chemin de son école, le cou également tordu. Le lien entre les deux meurtres est vite fait, Olivia va pouvoir compter sur l’aide de Mette Olstäter et Tom Stilton pour essayer de mettre à jour ces réseaux qui sont en train de mettre en place une série d’attaques au nom de la pureté aryenne.
De l’importance des réseaux d’extrême-droite nordiques
Dans leur premier roman, Cilla et Rolf Börjlind avaient mis en avant le milieu des SDF de Stockholm, la dureté et la violence de la vie dans la rue. Les néo-nazis étaient déjà abordés, notamment par leur haine de sans-abris qui, de par leur vulnérabilité singulière, en font des proies faciles. Avec Colère blanche, la thématique est encore plus développée : si les noms des personnages et des partis politiques utilisés sont inventés, les références — notamment à Anders Berhing Brejvik, terroriste norvégien ayant écrit un manifeste très célèbre — sont vraies, elles. On sent chez les auteurs la volonté de montrer une réalité plutôt sombre et souvent méconnue concernant l’extrême-droite nordique : comme beaucoup de pays occidentaux, la Suède doit faire face à une montée des théories aryennes et nationalistes.
Le meurtre d’enfant : le crime le plus violent
Le choix de mettre en scène des assassinats d’enfants est un parti pris intéressant, mais aussi délicat : au-delà du fait qu’ils n’ont pas choisi qui ils sont ni où ils vivent, leur fragilité est évidente. Que penser d’un état qui ne peut pas protéger ses enfants ? Et encore plus, que penser de ceux qui s’en prennent à des enfants par définition innocents ? Une fois encore, Cilla et Rolf Börjlind, en ciblant cette population comme victime après avoir pris les sans-abris dans le premier volet des histoires d’Olivia Rönning, choisissent non seulement de choquer, mais mettent également en avant la lâcheté de ces hommes qui veulent un monde purifié. Bien que l’on ne puisse pas qualifier Colère blanche de livre anodin, soulignons que le simple fait d’aborder ces thématiques n’en fait pas pour autant un livre engagé : il s’agit avant tout d’un thriller efficace.
Au final, Colère blanche se révèle être un polar plein de suspense, qui sait très bien appuyer sur des craintes contemporaines. Les personnages sont bien travaillés et intéressants, chacun ayant une histoire et un parcours atypique, renforçant l’empathie que l’on éprouve à leur égard. Abordant des thèmes tels que la survie d’un couple après la perte d’un enfant, les sectes, les mécanismes des partis politiques d’extrême-droite ou le nationalisme, Colère blanche est un très bon roman qui se lit d’une traite, mais dont la lecture laisse un goût amer.