Caractéristiques
- Auteur : Florian Forestier
- Editeur : Belfond
- Collection : Pointillés
- Date de sortie en librairies : 19 août 2021
- Format numérique disponible : Oui
- Nombre de pages : 336
- Prix : 19 euros
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- Note : 7/10 par 1 critique
Dernière lecture de l’année, Basculer de Florian Forestier aux éditions Belfond (L’amour au temps des éléphants, Cent voyages, Devouchki…) est un roman on ne peut plus actuel où la crise du Covid-19 et les préoccupations écologiques se percutent de plein fouet. D’une actualité brûlante, ce premier roman n’en est pas moins singulier et hautement personnel. On y croise des chargés de mission trentenaires et autres émissaires ambitieux œuvrant au service du gouvernement, mais aussi des militants écolos reclus à la campagne que Mathilde Guénot et son entourage courtisent pour pouvoir les utiliser auprès de l’opinion publique.
Un roman actuel au ton original et inattendu
Il faut un peu de temps pour entrer dans Basculer. L’auteur a choisi d’adopter un style narratif intimiste à contre-courant de ce que l’on pourrait attendre d’un roman politique. Alors que Mathilde, Daniel, Katia, Stanislas et tous les autres évoluent dans un milieu où les apparences, la communication et les jeux de pouvoirs et de séduction sont essentiels, Florian Forestier rentre sous la peau de chacun et nous livre un flot de pensées continu pour nous révéler des êtres fragmentés face à une réalité absurde qui semble de plus en plus se déliter.
Cette voix narrative neutre qui connaît tout des états d’âme de chacun n’étant pas différenciée en fonction des personnages, il faut un moment pour identifier clairement chacun et apprendre à connaître ces protagonistes auxquels on ne peut pas forcément toujours s’identifier. Mais, si l’on accepte ce parti pris à la Virginia Woolf et que l’on est sensible au sujet, Basculer révèle peu à peu ses trésors. On y découvre des acteurs politiques autrefois idéalistes qui, mis face à leurs faux-semblants, perdent pied et face à des intellectuels ou militants qui ne savent pas toujours comment réagir en intégrant un système face auxquels ils ne sont pas forcément armés. A cela s’ajoutent les militants qui tombent dans le complotisme et différents protagonistes de milieux sociaux différents qui vont se retrouver happés dans cette drôle d’histoire… L’intégrité et les idéaux peuvent-ils faire bon ménage en politique ? Pour atteindre certains cercles, faut-il forcément manipuler et utiliser les autres avant de les trahir ?
Les rebondissements narratifs de Basculer ne jouent pas sur le spectaculaire et sont même traités de la manière la plus simple possible, mais les questions que le livre pose en creux sont de celles qui restent en tête. Même si le roman perd parfois en force en raison d’un traitement qui peut parfois paraître un peu trop distancé – et ce même si cette distance des personnages vis-à-vis d’eux-mêmes et entre eux est un parti pris central – on est dans l’ensemble assez admiratifs de la matière présente dans ce premier roman. Les vagues dans les couloirs de Bercy et de Matignon, il fallait oser ! On ressort de ce petit théâtre de la comédie humaine où chacun semble se côtoyer sans jamais vraiment se connaître ou communiquer, avec une envie renouvelée d’authenticité, avant que les coutures ne craquent et que l’illusion d’ordre et de sécurité de notre société ne s’écroule.